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 LE THÉOLOGIEN
De A à Z

MORALE
 

Extrait de "Entretiens sur la Foi", chapitre 6, page 95 et suivantes.
Cette rubrique est forcément très riche, le théologien et le moraliste ayant beaucoup à dire sur le sujet. Ses mises en garde solennelles contre l'idéologie dominante , datant déjà des années 80, ont un caractère prophétique qui nous incite à la réflexion.
C'est la réponse à tous ceux qui, par le biais des medias, mettent constamment en cause avec mépris et agacement "la morale sexuelle rétrograde de l'Eglise catholique"


 

« [..]
Dans un monde comme l'Occident où l'argent et la richesse sont la mesure de tout, où le modèle commercial du libre-échange impose ses lois implacables à tous les aspects de la vie, l'éthique catholique authentique paraît désormais à beaucoup comme un corps étranger, lointain, une sorte de météore, qui s'oppose non seulement aux habitudes concrètes de la vie, mais aussi à la pensée qui les sous-tend.
Le libéralisme économique se traduit sur le plan moral par ce qui lui correspond exactement : la permissivité. »
...
« ..il devient difficile, sinon impossible, de présenter la morale de l'Église comme raisonnable, trop distante qu'elle est de ce qui est tenu pour évident, normal, par la majorité des gens, conditionnés par une culture hégémonique à laquelle ont même fini par se rallier de nombreux moralistes "catholiques" qui s'en font les défenseurs influents. »
« Dans la culture du monde "développé" a été rompu avant tout le lien indissoluble entre sexualité et maternité.
Séparé de la maternité, le sexe est hors de son contexte, il s'est trouvé privé de son point de référence : il est devenu une sorte de mine flottante, à la fois problème et pouvoir omniprésents. »
« Une fois accomplie la séparation entre sexualité et maternité, la sexualité a été séparée également de la procréation. Mais le mouvement a même fini par aller en sens inverse : autrement dit, procréation sans sexualité. De là s'ensuivent des expériences de plus en plus outrageantes - dont est truffée l'actualité - de technologie médicale où la procréation devient précisément indépendante de la sexualité. Progressivement, les manipulations biologiques déracinent l'homme de la nature (dont le concept même se trouve contesté). On essaie de transformer l'homme, de le manipuler, comme on le fait pour toute autre "chose" rien de plus qu'un produit planifié à plaisir. »
« Il ne s'agit certes pas de faire ici du moralisme rétrograde, mais de tirer avec lucidité les conséquences des données qui précèdent : il est en effet logique que le plaisir, la libido de chacun devienne le seul point de référence possible du sexe. Celui-ci, sans plus de raison objective qui le justifie, cherche une raison subjective dans l'assouvissement du désir, dans la réponse la plus "satisfaisante" possible pour l'individu aux instincts auxquels on ne peut plus opposer de frein rationnel. Chacun est alors libre de donner le contenu qu'il veut à sa libido personnelle. »
« Il est donc naturel que se transforment en "droits" de chaque individu toutes les formes d'assouvissement de la sexualité.
Ainsi, pour citer un exemple particulièrement actuel, l'homosexualité devient un droit inaliénable (et comment le nier avec de telles prémisses ?), et le reconnaître pleinement devient même un aspect de la libération de l'homme ».
« Détachée du mariage fondé sur la fidélité de toute une vie, la fécondité, de bénédiction (telle qu'elle était entendue dans toute culture) se retourne en son contraire : une menace pour le libre épanouissement du "droit au bonheur de chacun". Et voilà que l'avortement organisé, gratuit, socialement garanti, se transforme en un autre "droit", en une autre forme de "libération". »

« La mentalité désormais dominante attaque dans ses fondements mêmes la morale de l'Église qui, si elle entend rester fidèle à elle-même, risque alors d'apparaître comme un corps étranger, anachronique et gênant. C'est pourquoi, s'ils se veulent encore "crédibles", les experts occidentaux en théologie morale se trouvent placés devant une difficile alternative : il semble qu'ils doivent choisir entre le désaccord avec la société et le désaccord avec le Magistère. Selon le genre de questions, plus ou moins nombreux sont ceux qui choisissent ce second type de désaccord et partent à la recherche de théories et de systèmes qui permettent des compromis entre le catholicisme et les tendances en vogue.
Voici donc la lourde alternative : ou bien l'Église trouve une entente, un compromis avec les valeurs acceptées par la société qu'elle veut continuer à servir, ou bien elle décide de rester fidèle à ses propres valeurs (qui, à son avis, sont celles qui protègent l'homme dans ses exigences profondes), et alors elle se trouve mise à l'écart de la société elle-même.

« [..]aujourd'hui, le domaine de la théologie morale est devenu le principal champ des tensions entre le Magistère et les théologiens, d'autant plus qu'ici les conséquences se font sentir de la façon la plus immédiate.
J'aimerais citer quelques-unes de ces tendances : les relations pré-matrimoniales sont souvent justifiées, du moins sous certaines conditions; la masturbation est présentée comme un phénomène normal de la croissance de l'adolescent ; l'admission des divorcés remariés est continuellement reproposée ; le féminisme radical lui-même, particulièrement dans certains ordres féminins, peut ouvertement se manifester jusque dans l'Église ...
Quant au problème même de l'homosexualité, on assiste en ce moment à de nettes tentatives de justification : il n'a pas manqué d'évêques qui - par manque d'information ou par sentiment de culpabilité des catholiques envers une "minorité opprimée" - ont même prêté des églises à des gays pour accueillir leurs réunions.
Il y a ensuite la question d'Humanae Vitae, l'encyclique de Paul VI qui réaffirmait le "non" à la contraception et qui non seulement n'a pas été comprise, mais a été plus ou moins ouvertement rejetée dans de vastes secteurs de l'Église. »


 

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