Un roman pour le ROI

Au moment où ces lignes sont écrites (août 2000), la "reine du roman historique populaire" est entrain de publier aux éditions PLON une trilogie intitulée Le jeu de l'amour et de la mort, qui prend pour toile de fond le Paris de 1792-1794, lorsque la révolution se durcit, et échappe aux grands principes humanitaires de 1789 .

Le premier tome, intitulé Un homme pour le Roi s'ouvre aux alentours du 10 Août 1792, avec la prise des Tuileries et la chute de la monarchie, évoque les massacres de Septembre à la prison de la Force, le vol des bijoux de la couronne et la bataille de Valmy, et s'achève le 21 Janvier 1793 avec la tentative du Baron de Batz d'arracher Louis XVI à ses bourreaux et la mort du Roi dont la narratrice restitue sobrement le caractère pathétique.
Le deuxième tome (La messe rouge) qui vient de paraître, raconte les tentatives infructueuses pour faire sortir la famille royale de sa prison du Temple après la mort du Roi, l'assassinat de Marie-Antoinette, évoqué de façon vraiment émouvante, puis l'évasion du jeune Louis XVII (en contradiction avec les conclusions récentes d'un examen d'ADN qui bouscule cette thèse néanmoins plausible); après la grotesque fête de la raison, (d'une surprenante actualité...il suffit de penser aux festivités du millénaire ou du Mondial de football), il culmine lors de la "messe rouge" sanglante des exécutions de Prairial et s'achève avec la chute de Robespierre et l'espoir suscité par le 9 thermidor .
Le troisième tome (La comtesses des ténèbres) est encore attendu.

 

L'intrigue est romanesque à souhait, avec complots, traîtres à la solde de Monsieur, comte de Provence qui lutte dans l'ombre pour arracher le pouvoir à son frère puis à sa belle-soeur et à son neveu, et frêle héroïne jetée malgré elle dans la tourmente, mais aussi figures historiques ayant réellement existé et évoluant dans un contexte vraisemblable. Cela est joliment écrit et très bien documenté, sans nulle dérive carricaturale, et avec un souci d'objectivité et de réalisme dans le détail historique qui fait honneur à l'auteur. Les "grands ancêtres" y font piètre figure, et sont bien malmenés; le rôle des princes, frères de Louis XVI, "alliés objectifs" des jacobins y révèle toute son ambigüité, tandis que Le personnage du Roi, qui apparaît en filigranne, est sobre et émouvant. Je ne vois pas de meilleure façon de justifier la place de cette page dans mon site que de citer la post-face de Juliette Benzoni à son premier volume....

Note de l'auteur

[...] Le héros de ce roman est un personnage réel, appartenant à l'Histoire mais peu ou mal connu, sinon pas du tout en dépit du rôle important qu'il a joué. [...]

La Révolution, tout le monde sait à quoi s'en tenir. Mais ce que l'on connaît moins c'est, en marge de toutes les autres (guerre étrangère, guerre de Vendée, chouannerie), la lutte larvée mais impitoyable, qui a opposé les agents secrets royalistes entre eux. J'entends par là les partisans du roi Louis XVI et du petit Louis XVII contre ceux des princes leurs frères et oncles. Ce livre est un hommage au chef le plus important des premiers, le plus mystérieux et le plus attachant : Jean, baron de Batz, dont je suis la trace depuis longtemps. Gascon, il appartient à la même souche familiale que d'Artagnan et, comme lui, il n'eut jamais qu'un seul maître: le Roi, auquel il vouait respect et affection. Comme lui, il maniait en maître l'épée et le pistolet, mais contre la Convention qu'il voulait abattre, il sut employer une arme vieille comme le monde et cependant beaucoup plus moderne: la corruption.

C'est aussi un hommage à un souverain qu'il est de bon ton de dénigrer, voire de tourner en ridicule comme le faisaient les courtisans de Trianon. Il fut l'un des plus humains de nos rois. Homme de sciences - il était peut-être le meilleur géographe de son royaume, et pas seulement un serrurier amateur! - Louis XVI n'était sans doute pas fait pour porter la couronne (*) , mais, plutôt que de verser le sang de son peuple, il choisit de changer la sienne pour celle de martyre. De moeurs pures, exempt de vices comme de favorites, profondément chrétien, il eut le tort de trop aimer sa femme (*). Il abolit la torture, voulut remplacer la Bastille par un jardin, aida une vieille colonnie anglaise à devenir les Etats-Unis et paya les factures en souffrance de Louis XV et même de Louis XIV. La grandeur de sa mort - il faut avoir lu son testament - aurait dû lui valoir une petite place auprès de Saint-Louis, une petite auréole... Lui au moins n'alluma jamais de bûchers! Mais l'Eglise a de ces absences...

 

(*) Je ne partage pas cette opinion, mais elle est
compréhensible si l'on se réfère aux sources invoquées par l'auteur:
Alain Decaux, André Castelot, Claude Manceron...