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LE PAPE REVIENT À LA SOURCE
 

Philippe SOLLERS. - Ce qui m'intéresse ici, c'est l'implication personnelle de ce pape pour revenir à la question fondamentale : qui est le Christ ? Je vérifie chaque jour que les Évangiles sont ignorés, y compris des chrétiens eux-mêmes. Le Pape revient à la source.
Il commence par le baptême de Jésus et montre comment ce personnage devient le Christ. Il nous fait sentir, dans un chapitre qui s'appelle «Les Tentations de Jésus», que le diable est bien là. Satan existe : il tente Jésus lui-même. Il lui demande de montrer sa puissance en transformant les pierres en pain, etc. Il y a aussi un chapitre sur le royaume de Dieu, puis le sermon sur la montagne et les Béatitudes... Et un autre sur la prière. Comment Jésus prie-t-il ? Les paroles du Notre Père, qui sait encore ce qu'elles signifient ? Enfin, il y a un chapitre admirable sur les images de l'Évangile de Jean. L'eau, la vigne, le vin, le pain : ce sont des fondamentaux.
Il faudrait parfois que les catholiques se rappellent pourquoi ils ne sont pas protestants. À travers les paroles du Christ, le pain devient corps et le vin, sang. Il faut rappeler ces choses-là, qui ne sont plus guère connues ni ressenties. Enfin, il y a les affirmations de Jésus sur lui-même : Fils de l'homme, Fils de Dieu et surtout « Je suis » le Christ qui apporte la vie, c'est-à-dire l'idée que le pacte avec la mort est rompu. Souvenons-nous du discours de Jean-Paul II contre « la culture de mort ».
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Q: Ce pape philosophe vous paraît-il être dans la continuité de Jean-Paul II ?

P. S. - Ces deux papes semblent différents, avec des expressions et un charisme qui peuvent paraître opposés. Pourtant, ils me semblent unis par un lien de continuité. Rappelons d'abord que Jean-Paul II a été un pape historique. N'oublions pas l'assassinat raté de la place Saint-Pierre de Rome, le 13 mai 1981. Ni l'extraordinaire soulèvement polonais à l'époque où existait encore l'URSS. Un très grand pape, donc. Arrive Joseph Ratzinger. Il choisit son nom en référence à la lignée des Benoît qui ont essaimé dans l'histoire. Le premier étant le saint patron de l'ordre bénédictin, mais il y en aura d'autres. Je n'en cite que deux. Benoît XIV, le pape dit « des Lumières », avec qui Voltaire avait des relations courtoises. Et Benoît XV qui, durant la Première Guerre mondiale, a répété dans le désert que si Français et Allemands continuaient leur boucherie réciproque, il risquait de se produire en Europe un phénomène terrible.
... Cette continuité invisible entre les papes est autrement décisive que cette ­fixation des médias sur les questions sexuelles. Le tintamarre permanent qui se fait autour de l'obsession sexuelle (avortement, contraception, chasteté...) nous cache l'essentiel : le rôle décisif de Jean-Paul II dans l'écroulement de l'empire soviétique. Et ce livre passionnant de Benoît XVI sur Jésus de Nazareth.

J.-L. M. - Je souscris à ce que vous dites. J'ajoute que la polémique récurrente sur l'enseignement des papes est peut-être une manière pour nos sociétés d'avouer leurs contradictions. Il suffit que le pape parle pour que des gens qui ne veulent surtout pas être catholiques y voient un reproche personnel. N'est-ce pas une manière de reconnaître son magistère spirituel?
Alors, admettons que nous sommes tous un peu catholiques.
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Q: Les interventions du Pape semblent contestées dans l'opinion, y compris chez les catholiques. Ce livre peut-il aider à inverser le phénomène ?

P. S. - Nous sommes face à une guerre de désinformation qui déforme tout ce que peut dire tel ou tel pape.
Récemment, un article du Nouvel Observateur, repris du journal italien Il Manifesto, affirmait que le Pape avait une vision désespérée de la société. Une vision quasiment wagnérienne du monde. Il serait un admirateur de l'auteur du Crépuscule des dieux, sa culture serait trop allemande, etc. L'article affirmait aussi que, « peu convivial », il restait en tête à tête avec son secrétaire particulier, un Bavarois aux yeux bleus. Nous sommes dans Les Damnés de Visconti. C'est embêtant de désinformer à ce point quand on sait que la première chose qu'a faite ce pape-là, c'est de préciser à quel point il admirait Mozart qu'il jouait constamment au piano. Vous allez me dire : un pape qui joue du Mozart, quelle importance ? Un détail. Certainement pas. Un pape qui joue une sonate de Mozart, voilà qui atteste, de mon point de vue, que Dieu existe.

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