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L'ABBÉ BARTHE SUR LE FC
 

Q: Comment analyser le fait que le MOTU PROPRIO du Pape BENOIT XVI tarde à paraître et à être communiqué à toute l'Eglise ; en dehors du fait que les Evêques de France ont, je pense, été un obstacle à cette promulgation. Quels sont les autres facteurs !
Si ce dernier venait à être promulgué ; ne croyez-vous pas qu'il serait tellement restrictif dans ses modalités d'application qu'il rendrait la tâche difficile à tous les prêtres et religieux des communautés "écclésiadéistes" (pardonnez l'expression) et de celles de l'"Eglise conciliaire" et de la mouvance "FSSPX". Autrement dit la liberté donnée ne devriendrai-t-elle pas plus une contrainte !
D'autre part, n'avez pas exagéré le trait en disant de BENOIT XVI qu'il était "un traditionnaliste éclairé" !

R: Autant qu’on puisse le savoir, il y aurait eu deux moutures successives du MP. C’est la deuxième – qui serait plus complète et qui préciserait, notamment, sur le règlement des litiges – qui a été examiné par la plenaria de la Commission Ecclesia Dei en décembre. Les quelques modifications apportées auraient été intégrées par la Commission et le texte est « à la signature » sur le bureau du pape. Il est notoire qu’il prend son temps pour les décisions (c’était devenu légendaire à Munich, dans le bref temps où il a été archevêque).
Le texte est désormais connu du cardinal Ricard, du cardinal Barbarin et d’un certain nombre d’évêques français, au moins pour les grandes lignes. Leurs réactions, les précautions qu’ils prennent, la manière dont ils en parlent à leur clergé, semblent indiquer qu’il n’y a rien d’institutionnel dans le document (il ne devrait théoriquement en rien concerner les communautés Ecclesia Dei comme telles), mais que la « demande des fidèles » devrait obligatoirement être satisfaite, sans qu’ils puissent s’y opposer, sauf de manière motivée.
Je ne pense pas, mais je peux me tromper, que la liberté devienne contrainte. Je crois que le choc psychologique que la liberté produira sera salutaire, même si elle entraîne des difficultés, celles que l’on peut prévoir et d’autres, très certainement, que l’on ne peut prévoir.
J’ai répondu un peu dans le désordre, mais je crois sur le fond de votre question. J’insiste bien sur le conditionnel que j’ai constamment employé.
Par ailleurs, j’avais parlé du « progressisme modéré » de Jean XXIII, en l’opposant au « traditionalisme éclairé » de Benoît XVI. Étant concédé le caractère journalistique de la formule, je persiste et signe. « Eclairé » aussi en ce que Joseph Ratzinger n’est pas sans une certaine ascendance intellectuelle joséphiste, au meilleur sens du terme : il cherche à sauver ce qu’il a pu y avoir de bon dans les Lumières.

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R: La « réforme de la réforme » est une des grandes idées de Benoît XVI. Les récentes révélations du Figaro et de Il Foglio, en Italie, montrent qu’il avait des idées concrètes sur sa mise en œuvre (à savoir sur un mélange des deux missels) depuis son arrivée à la Congrégation pour la Doctrine de la foi, au début des années 80.
[..] L’exhortation post-synodale sur l’eucharistie pourrait apporter quelques encouragements à « retoucher », selon le terme lancé par un cardinal et que s’est approprié le pape, la réforme de Paul VI. Apparemment les choses seront très longues. Le pape est un homme de prudente réflexion, un homme de textes exhortatifs plus que de discipline obligatoire, un homme d’actions exemplaires par petites touches plus que de gros coups médiatiques. Je crois que l’analogie, à sens inversés, entre les papes Roncalli et Ratzinger comme papes de transition, pourrait être juste aussi sur ce point : l’un comme l’autre auront ouvert les portes. À nous de les franchir !

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Q: Vous avez utilisé dans nombre de vos écrits et de vos interventions la formule de "franchissement positif" pour caractériser la période qui se déroule depuis les dernières années du pontificat de Jean-Paul II jusqu'à aujourd'hui.
Comment voyez-vous la situation évoluer tant sur le plan liturgique que sur le plan du "retour au magistère" alors même que, d'une part,
le Motu proprio tant attendu tarde à venir et est environné de nombreuses critiques, et que, d'autre part, les forces de dissolution de l'Eglise ne semblent pas faiblir ?

R: J'ai utilisé la formule de « franchissement positif » pour caractériser le réformisme ratzinguérien – celui du cardinal devenu pape et celui des théologiens proches de lui. C'est-à-dire que, ni en matière de théologie, ni plus généralement, il ne s’agit pour eux, au moins volontairement, d’un retour à Pie XII. Autrement dit, on ne saurait attendre de leur part, purement et simplement, la fermeture de la parenthèse qu’aurait représentée la réforme liturgique et le Concile en ce qu’il a de plus conciliaire. [..]
Le ratzinguérisme cherche quelque chose comme une synthèse des positions affrontées, avec une relativisation de la position «progressiste» tout en conservant une part de ses apports. Cela vaut en liturgie, dans les projets de réforme de la réforme.[..]
Si ce processus se confirmait, il aurait l’avantage de provoquer une espèce de déséquilibre de l’édifice idéologique conciliaire (je ne dis pas de tout le Concile en tous ses textes, je dis du Concile comme idéologie).
[..]
Quant aux forces de dissolution de l’Église, il est vrai qu’elles dissolvent plus que jamais. Il faudra tôt ou tard en venir au moment de vérité : ce sera l’autre aspect (la condamnation ou son équivalent) du retour au dogme. Ce qu’on demande en permanence aux traditionalistes – qu’ils donnent des preuves qu’ils sont « en communion » – il faudra bien, et le plus tôt sera le mieux, le demander à tel professeur parisien qui pervertit la doctrine d’Humanae vitae, à tel curé qui ne croit pas à l’enfer, à tel évêque qui déclare que l’Église n’a pas a donner de directives engageant les consciences. L’Église ne peut pas se passer de frontières positives (il faut croire ceci = dogme) et négatives (qui ne croit pas ceci ne fait plus partie de l’Église).

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Q: N'y a-t-il pas quelques fondements aux déceptions qui semblent se faire jour dans le camp tradi-conservateur deux ans quasiment après l'élection de Benoît XVI ?
Quelques exemples :
- nominations étranges : Claudio HUMMES ;
- liturgie :
motu proprio arlésienne alors que comme le rappelle Luc PERRIN, le cardinal RATZINGER réfléchit sur la liturgie depuis plus de 30 ans ;
- poursuite des discours ambigus sur l'Islam (visite controversée en Turquie).
Le bilan n'est-il pas décevant au bout de deux ans ? BENOIT XVI ne se révèle-t-il pas pusillanime ?

R: [..] Mon optimisme est délibérément volontariste.
Sur la doctrine, Benoît XV n’est pas un traditionaliste, mais un réformiste. En revanche, il est proche de nombreux théologiens, qui sont, quant à eux, franchement traditionnels d’esprit. C’est une banalité de dire qu’il est intelligent. Mais il a du génie avec une grande souplesse. Il est aussi humble et se range à des arguments théologiques solides. N’avait-il pas écrit en 1969 que « la doctrine de la divinité de Jésus ne serait pas mise en cause, si Jésus était issu d’un mariage normal » ? Mais, il s’est clairement corrigé en 1977.
[..] Si donc, aujourd’hui, dans son discours à la Curie du 22 décembre 2006, il a dit qu’il « respectait la religion islamique », certes en citant Nostra aetate, il pourra, j’en suis certain, revenir sur cette affirmation, en disant par exemple qu’il respecte a priori les hommes qui pratiquent la religion islamique, ou qu'il respecte les éléments de religion naturelle qui se trouvent dans l'islam.
Sur son gouvernement, il subit actuellement de vives attaques de gauche (à Rome, dans un article récent Henri Tincq, dans le journal italien Panorama), toutes sur un schéma identique : Benoît XVI s’avère ne pas être un homme de gouvernement, fragilisé qu'il est, disent-ils par la nomination désastreuse de l’archevêque de Varsovie, affaire qui se double d’une crise très complexe entre lui et les prélats polonais, fragilisé par les effets qu’il n’avait pas prévus du discours de Ratisbonne, et fragilisé par l’annonce du motu proprio qui a mis l’épiscopat français en état de révolte larvée.
Raison de plus pour le défendre [..] Mais je répète que suis persuadé que la continuation à la Curie d’hommes de confiance (je dis bien hommes de confiance, qu’il connaît de longue date, qui ne l’ont jamais trahi, et non pas nécessairement des traditionnels comme nous aimerions) va finir par porter ses fruits sur les nominations françaises. Je veux le croire !
Benoît XVI est particulièrement tenace, pour ne pas dire têtu dans ses projets. Sera-t-il, lui ou son successeur, l’homme des grands affrontements à l’intérieur de l’Église, ultime et inévitable conséquence de l’époque de Vatican II ?


Note: Ecclesia Dei

Ecclesia Dei adflicta sont les premiers mots d'un motu proprio promulgué par le pape Jean-Paul II le 2 juillet 1988

Il s'agit d'une réponse au schisme provoqué par Mgr Lefebvre, à la suite d'ordinations épiscopales sans mandat pontifical au sein de la Fraternité Saint-Pie X. Outre le rappel de l'excommunication des évêques consécrateurs et des quatre nouveaux évêques, le motu proprio affirme le désir de l'Église de réunir à la communauté catholique les fidèles traditionalistes, notamment en demandant aux évêques d'accorder de façon « large et généreuse » la pratique des livres liturgiques de 1962 dans leurs diocèses.

Selon le motu proprio :

« À tous les fidèles catholiques qui se sentent attachés à certaines formes liturgiques et disciplinaires antérieures de la tradition latine, je désire aussi manifester ma volonté — à laquelle je demande que s'associent les évêques et tous ceux qui ont un ministère pastoral dans l'Église — de leur faciliter la communion ecclésiale grâce à des mesures nécessaires pour garantir le respect de leurs aspirations. »

À la suite de ce motu proprio est mise en place la Commission pontificale "Ecclesia Dei" qui veille à l'organisation des communautés catholiques traditionalistes dans le monde, particulièrement en France et en Amérique latine.

C'est ainsi que sont dites « communautés Ecclesia Dei » la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre, l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre, ou l'institut du Bon Pasteur, mais aussi des monastères bénédictins tel l'abbaye Sainte-Madeleine du Barroux ou abbaye Notre-Dame de Fontgombault ou encore des communautés religieuses dominicaines, augustiniennes ou diocésaines. Ces communautés acceptent les conclusions du concile Vatican II, notamment en matière d'ecclésiologie, et reconnaissent l'autorité pontificale, dont elles dépendent parfois directement, mais bénéficient d'une dispense quant à la liturgie employée dans leurs célébrations

Source: Encyclopédie Wikipedia


 

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