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LA TRACE

Petite réflexion sur les mystères de l'édition

Les librairies de grande diffusion sont devenues de vastes 'show-rooms' -c'est d'ailleurs le rôle que leur département 'hi-tech' a décidé d'assumer face la concurrence de la vente en ligne. On n'y vient pas forcément pour acheter les livres, car mieux vaut le faire ailleurs, mais pour voir, éventuellement feuilleter, ceux qui sont proposés aux chalands. Et faire le compte de ceux qui ne le sont pas. Parmi ces derniers, beaucoup qui m'intéresseraient, que je parviens heureusement à me procurer autrement, ce qui prouve que mes goûts sont marginaux, mais je le sais depuis longtemps.
J'ai déjà eu l'occasion de parler du rayon religions d'un certain "agitateur d'idées", c'est édifiant, et je ne rajouterai rien aujourd'hui sur ce sujet. Il y a évidemment les livres d'histoire, les pamphlets et essais politiques ou sociologiques, là, je m'auto-censure... Et l'énorme rayon des livres de cuisines, alors que la plupart de gens ne sont pas concernés puiqu'ils consomment vite fait des plats tout prêts et font réchauffer des surgelés au micro-ondes. Curieux...
Un autre rayon très emblématique et très intéressant est celui des 'thrillers'. La violence la plus glauque et la plus sordide de notre époque, avec les horribles 'suspenses' autour de 'serial-killers' apparus dans les années 90 (dernière livraison: l'enfance d'Hannibal Lecter, pour ceux qui ont le coeur bien accroché) s'y étale en libre service. En ce moment, mon attention est plutôt attirée par les 'polars ésotériques' dans la veine du Da Vinci Code. J'en ai déjà parlé, j'ai réfléchi, depuis, et je ne suis pas éloignée de trouver surfaite mon indignation d'alors.
Il y a toujours une profusion de titres, qui circulent puis disparaissent assez rapidement, selon une technique de marketing bien rôdée; je peux avoir mélangé, c'est d'ailleurs sans importance, on y trouve, pêle-mêle "le dernier Templier", "le secret du treizième apôtre", "le testament de Marie-Madeleine", "le troisième cecret", et même "l'évangile de Satan". Bien entendu, tout cela est destiné au pilon à plus ou moins brève échéance, comme certains romans à l'eau de rose, car j'ai fini par soupçonner que peu de gens les achètent, déjà à cause de leur prix élevé. L'essentiel est qu'ils existent, et qu'on les voie, c'est pourquoi la couverture en est généralement attrayante et luxueuse. Ils sont par ailleurs si ennuyeux, si répétitifs, si mal écrits avec leurs courts chapitres évoquant des séquences de films, si compliqués dans leurs intrigues et si simplistes dans leur fond, qu'on n'a guère envie de les ouvrir. Quand on a lu la quatrième de couverture, on a tout lu. A ce sujet, mon cerveau, en lisant cette page unique fonctionne un peu, en toute modestie, évidemment, comme un moteur de recherche, par mot clés. Et ce moteur de recherche n'est jamais déçu. Il trouve presque inévitablement les mots Vatican, Eglise, mensonge, secret, inavouable, pape, ébranlement, fondements, christianisme, et plus rarement, mais cela arrive, nazi.

J'ai donc eu une très agréable surprise en trouvant un livre intitulé "La trace", sorte de version chrétienne du Da Vinci Code, sur le thème de la quête du Saint-Graal. Jeanne Smits en a depuis parlé avec talent dans Présent, je ne rajouterai donc rien à son article, reproduit partiellement ci-dessous.
Je l'ai trouvé caché (réellement et très efficacement caché, mais je suis aussi curieuse que tenace...) au rayon "religions", tout au fond du magasin, dans une librairie de province, qui a pourtant un rayon 'polars' très fourni, en évidence dans l'allée centrale. Et j'ai vérifié qu'il n'était disponible ni à la Fnac, ni chez Virgin. C'est dommage, car il est écrit d'une plume alerte, et très agréable à lire. Mais surtout, cette absence est à elle seule un aveu de la censure qui règne aussi dans le domaine de l'édition. Elle confirme qu'il y a sans doute une stratégie de formatage idéologique derrière cette invasion de livres médiocres tous sur le même sujet: manifestement, il ne s'agit pas uniquement de vendre du papier en flattant le mauvais goût et en profitant de l'ignorance des lecteurs. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'on peut constater que la logique purement mercantile -et donc la plus facile à admettre- est battue en brèche par des considérations d'un tout autre ordre. Le même phénomène se constate avec la presse, les sondages, et à un degré moindre, avec la télévision.

Je ne saurais que conseiller à ceux qui visitent ces pages de lire "La trace", comme Jeanne Smits les y invite aussi.
(20 février 2007)
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La Trace, par Frédéric Bovis, Jean-François Lopez et Léopold Jorge, Tolège éditions, 90, rue Daguerre, 75014 Paris, 372 pp.


Pour résister au “Da Vinci Code”

... suivez cette “Trace”
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Jeanne Smits
...
Ce n’est pas parce que le Da Vinci Code appartient désormais à une forme de passé littéraire où les enterrements vont très vite qu’il faut croire le pouvoir de nuisance d’une telle entreprise achevé. [..] il manquait une sorte de contre-roman, une histoire bien contée qui vienne plonger le public désormais très réceptif à ce genre de vraie-fausse narration historique dans un environnement plus sain, et somme toute plus saint.
C’est désormais chose faite grâce à une équipe de trois auteurs, Frédéric Bovis, Jean-François Lopez et Léopold Jorge, qui dans La Trace ont voulu remettre le genre à l’endroit.
[..] C’est bien fait, rondement mené, conté sans confusion malgré les exigences d’un scénario qu’il faut bien avouer compliqué et respectueux de la loi du genre : le lecteur est embobiné jusqu’au bout et les coups de théâtre sont nombreux, dans une tension qui se maintient jusqu’à la dernière page. Suprême élégance de ce thriller qui ne prétend point révéler la vérité, mais qui entend rester pointilleusement dans le vrai : l’intrigue et le dénouement reposent sur une juste vision du respect dû aux dogmes de la Foi et des choix qui ne doivent pas être dictés par les critères du monde. La Trace, résultat d’une excellente initiative éditoriale, réussit son double pari de rétablir l’honneur chrétien dans le monde du thriller tout en proposant de façon bien réussie une agréable lecture de détente.


 

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