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... accompagné de belles photos (27/9/2008)


Catherine m'a envoyé le lien vers le site d'Andrew Cusack, un américain diplômé de l'Université St-Andrew en Ecosse, apparemment amoureux de la messe traditionnelle.
Elle me signalait de belles photos.
Le texte n'était pas mal non plus, révélant une bonne connaissance de notre pays, de sa culture et de son histoire.
De plus, c'est un récit complet et fidèle du bref séjour parisien.
Je l'ai donc traduit...

http://www.andrewcusack.com/2008/09/14/the-pope-in-paris/



Benedict XVI brings a message of love & hope to the City of Light

La devise de la ville de Paris, Fluctuat nec mergitur est parfaitement appropriée: « Battue par les flots, elle ne sombre pas ». Difficile de trouver des mots plus aptes à décrire la barque de Pierre, dont le Saint-Père, le pape, a passé ces deux jours dans la capitale française.
Depuis des temps immémoriaux, la France a été considérée comme « la fille aînée de l'Eglise », son siège de primauté de Lyon ayant été établi au cours du deuxième siècle et Clovis, son premier roi chrétien, ayant reçu le baptême en 498.
Mais à côté de 1.500 ans de christianisme, au cours des deux derniers siècles, la France, a également servi de fonds baptismaux à la révolution et à la rupture - dans l'esprit-même de ce premier "non serviam" (phrase attribuée à Lucifer, refusant de servir Dieu, ndt) .
Ce fut le penseur français Charles Maurras - lui-même non-catholique jusqu'à la fin de sa vie - qui a conçu de la notion que (depuis la révolution) il n'y avait pas une France mais deux : le pays réel et le le pays légal. La vraie France, catholique et droite, contre la France officielle, irreligieuse et artificielle.
Tout comme Maurras différenciait les deux visions de la France, nous, dans le monde d'expression anglaise, savons que l'Angleterre est vraiment un pays catholique qui souffre d'un interregnum de quatre-siècle (de même que l'Ecosse, et l'Irlande, et l'Amérique, et le Canada, et l'Australie…). Nous aimons nos patries mais nous savons qu'elles ne sont pas vraiment elles-mêmes - elles ne reflètent pas vraiment cette idée de leur essence - jusqu'à ce qu'elles jouissent de la plénitude de la communion chrétienne.


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Andrew Cusack (1)

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Et ainsi, en route pour célébrer le 150ème anniversaire du grand sanctuaire de Lourdes, le Saint-Père est venu à Paris, pour rappeler à la France ses racines, son histoire, et son héritage chrétien.
Etrangement, Benoît XVI a trouvé un ami dans le président de la République, Nicolas Sarkozy. « Sarko » est la réponse de la France à une question que personne ne pose - à quoi ressemblerait un homme qui serait à la fois Bill Clinton et George Bush ? - mais cet homme, non-religieux, ayant des origines juives (ndt: en fait Sarkozy est catholique), s'est montré enthousiaste à l'idée de remplacer une « laïcité négative qui rejette » avec (ce sont ses mots) « une laïcité positive qui discute, respecte et inclut ».
Au lieu d'une situation dans laquelle la République limite l'église, Sarkozy plaide pour une République où l'église (et la mosquée, et la synagogue, et la loge maçonnique…) peuvent paisiblement coexister et même agir les une sur les autres.
Alors que le sécularisme « positif » de Sarkozy est loin de la vision chrétienne traditionnelle de la société, Benoît XVI est un pragmatique, peut-être parce qu'il est un intellectuel. Il sait que la raison est du côté de l'église et que la foi a pour la soutenir le poids intellectuel de siècles de pensée. Si « la laïcité positive » libére un espace pour que l'église proclame l'Evangile, alors elle doit être bien accueillie.

Comme c'est la coutume, la première visite du Pape fut une visite de courtoisie au président, comme un chef d'Etat en rend à un autre.
Le Président Sarkozy a souhaité la bienvenue au Saint-Père au palais de l'Elysée avec tous les honneurs. Après une discussion privée avec le président, Benoît a rencontré d'autres personnalités officielles, y compris des membres du gouvernement.

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Andrew Cusack (2)

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Vers la fin de l'après-midi, le pape s'est rendu au Collège des Bernardins, un monastère médiéval qui a été récemment restauré et est maintenant un centre catholique de recherche et de débats universitaires. Au Collège, le Saint-Père a pris part à une « rencontre avec le monde culturel », deux ans après son célèbre discours de Ratisbonne. Avec sept cents universitaires, intellectuels, et personnalités du monde de la culture comme auditoire, Benoît a dénoncé le nihilisme rampant qui érodait les fondements de l'Europe. « Ce serait un désastre si la culture européenne d'aujourd'hui ne concevait la liberté que comme absence d'engagement, » a noté le pape. L'« absence d'engagement et le caractère arbitraire ne signifient pas la liberté, mais sa destruction. »

A l'extérieur du Collège, de nombreux jeunes catholiques ont suivi la retransmission de la « rencontre avec le monde de la culture » et ont été rejoints par ceux qui voulaient entendre la pensée du pape.
« Pour beaucoup, Dieu est vraiment devenu le grand Inconnu", a dit le Saint-Père. Malgré tout, comme jadis où derrière les nombreuses représentations des dieux était cachée et présente la question du Dieu inconnu, de même, aujourd’hui, l’actuelle absence de Dieu est aussi tacitement hantée par la question qui Le concerne. Quaerere Deum – chercher Dieu et se laisser trouver par Lui : cela n’est pas moins nécessaire aujourd’hui que par le passé. Une culture purement positiviste, qui renverrait dans le domaine subjectif, comme non scientifique, la question concernant Dieu, serait la capitulation de la raison, le renoncement à ses possibilités les plus élevées et donc un échec de l’humanisme, dont les conséquences ne pourraient être que graves. Ce qui a fondé la culture de l’Europe, la recherche de Dieu et la disponibilité à L’écouter, demeure aujourd’hui encore le fondement de toute culture véritable. »

Quittant le Collège, Benoît a pris un moment pour prendre dans ses bras et bénir quelques bébés, dans la foule massée le long des rues.

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Andrew Cusack (3)

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Dans la soirée, le pape Benoît a célébré les Vêpres dans la cathédrale Notre-Dame avec des prêtres, des religieux, et des séminaristes, et aussi avec des représentants des églises catholiques orientales, des églises orthodoxes, et des dénominations protestantes.

Après les Vêpres, Benoît s'est adressé aux 60.000 personnes - pour la plupart des jeunes - qui s'étaient rassemblées sur la place et dans les rues entourant Notre-Dame. Dans ses propos, le pape a condamné « le fondamentalisme fanatique », qui, pour beaucoup visait l'Islam radical, mais qui pouvait tout aussi bien être compris comme une attaque contre le nihilisme athée de l'"établissement" européen, ou contre l'impérialisme libéral agressif de Washington.
Après le discours du pape, une statue de la Vierge fut conduite en procession dans les rues de Paris, depuis la cathédrale jusqu'à la Nonciature apostolique où le pape résidait pendant son séjour.
Devant la Nonciature, des catholiques de tous âges s'étaient rassemblés, attendant quelques mots supplémentaires de la sagesse du pontife suprême.

Benoît, dûment obligé, s'est adressé à la foule depuis le balcon de la Nonciature, avant de donner sa dernière bénédiction du jour.

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Andrew Cusack (4)

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Samedi a commencé par une visite à l'une des les plus augustes institutions françaises, l'Institut De France, une société savante composée de cinq académies (la plus célèbre étant l'Académie Française, dont les membres sont connus sous le nom 'les Immortels' - en français dans le texte).
Le chancelier de l'Institut De France a souhaité la bienvenue au pape, qui a parlé aux académiciens rassemblés dans le grand hall de l'institut. Alors que l'Institut lui-même fut fondé par des franc-maçons de la loge des Neuf Soeurs, la plupart des académies qui en font actuellement partie ont leurs origines durant la monarchie catholique de la France.
L'Académie française, fondé en 1635, est la plus ancienne des cinq académies. Corneille, Racine, La Bruyère, Chateaubriand, Lamartine, de Tocqueville, Montalembert, et plus tard Maurras ne sont qu'un échantillon de la longue liste de ses membres catholiques à travers l'histoire. Elle a compté pas moins de 15 cardinaux, 10 archevêques, et 26 évêques parmi ses académiciens.

Le point culminant de la visite du Saint-Père à Paris, cependant, fut la Sainte Messe, célébrée sur l'Esplanade des Invalides durant la matinée de samedi. Des centaines de milliers - littéralement des centaines de milliers - de personnes ont assisté à cette messe. Ils sont venus pour participer à l'eucharistie, et pour entendre ce que Benoît XVI avait à leur dire.
L'immense foule a écouté attentivement l'homélie du pape.
Le pontife a remis en cause les hypothèses de la culture « post-Chrétienne ». « Notre monde moderne n'a-t'il pas créé ses propres idoles ? » a demandé le pape. « N'a-t-il pas imité, peut-être sans le vouloir, les païens de l'antiquité, en détournant l'homme de sa véritable fin, la joie de la vie éternelle avec Dieu ? L'argent, la soif de possessions et de puissance, et même de connaissance, n'ont-ils pas détourné l'homme de son vrai destin? »

Citant la Sainte Ecriture, le pape a rappelé que « l'amour de l'argent est la racine de tout le mal » et a dénoncé « la cupidité insatiable » de la société moderne comme « un scandale, une vraie peste ».
Les mots de Benoît sont un écho du rappel constant de son prédécesseur Jean Paul II selon lequel une société de matérialisme détachée de l'amour de Dieu finit par s'auto-dérruire.

Dans la foule, beaucoup parmi ceux qui furent interrogés par les agences de presse, ont admis que le message du pape était exactement celui qu'ils attendaient, et ont exprimé l'espoir que les nombreux ministres du gouvernement et hauts fonctionnaires présents dans l'assistance prendraient note de la condamnation par le pape du matérialisme, et de sa forte exhortation vers l'amour de Dieu.


Nous ne connaîtrons pas avant quelque temps l'effet réel de ces deux brèves journées que le Saint-Père a passées à Paris.
La France a certains des évêques parmi les plus turbulents, ayant contrecarré les plans du pape pour remplacer et réformer la liturgie, qui est centrale à la vie chrétienne.
Néanmoins, depuis l'aube même de la révolution, la fille aînée de l'Eglise a toujous eu une culture secondaire contre-révolutionnaire assez vaste pour agir en tant que tremplin important pour l'église.
Pendant des décennies, les évêques modernistes de France se sont coupés de la partie le plus vivante et la plus fiable de l'Eglise en France : ceux qui sont attachés à la forme antique de la liturgie romaine. La visite de Benoît XVI aura sans doute fourni beaucoup d'inspiration et d'espoir à de nombreux fidèlse catholiques de France, mais il reste à voir si les évêques en finiront avec leur résistance. Pour l'instant, nous pouvons espérer et prier.

© Copyright 2008 Andrew Cusack