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SIMPLICITÉ, LA MARQUE DE JOSEPH RATZINGER
 

Simplicité, c'est le mot qui qualifie le mieux Benoît XVI. C'est la clé de sa personnalité.
Une simplicité enracinée dans sa famille, son éducation, son parcours personnel, mais aussi structurée par une pensée rigoureusement scientifique.
Beaucoup de gens ont du mal à admettre que quelqu'un d'aussi humainement doué puisse être en même temps aussi simple. Simple dans ses manières sans formalisme, dans ses relations avec les gens, dans sa façon de s'exprimer, chaque Angelus, chaque audience en témoigne.
Son style, nous l'avons déjà souvent souligné, est dense, mais surtout concis, accessible et limpide. Il n'a recours a aucun "tic" de langage, et n'utilise pas les mots creux et abscons dont les professionnels de la communication émaillent leurs discours pour masquer le vide de leur pensée. Lorsqu'il utilise un mot savant (comme par exemple herméneutique), c'est qu'il est nécessaire à son argumentation, et rien n'empêche de prendre le dictionnaire... Je le sais, car il m'est arrivé assez souvent de le traduire... à partir de l'italien.

Cette simplicité, selon l'article de Sandro Magister, déjà commenté dans plusieurs sites français, se retrouve dans sa théologie.
C'est "un regard clair sur l'essentiel". Ceui que l'on retrouve, par exemple, dans toutes les cathéchèses...

Article en entier sur le blog de Sandro Magister


 

Franz Michel Willam, le théologien que le pape a tiré de l'oubli
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Auteur en 1932 d'une célèbre vie du Christ, il était oublié de tous. Benoît XVI le cite dans "Jésus de Nazareth" et un chercheur autrichien explique pourquoi, en se basant sur une correspondance inédite entre les deux hommes.

Sandro Magister cite "un article publié dans le dernier numéro de "Vita e Pensiero" , la revue de l’Université Catholique du Sacré-Cœur de Milan, écrit par le jeune théologien autrichien Philipp Reisinger.

Citant une correspondance entre Joseph Ratzinger et Franz Michel Willam dans les années 60, il montre qu’ils avaient en commun la conviction que le secret de la grande théologie chrétienne – celle qui ne s’adresse pas seulement aux connaisseurs – est "la simplicité", "le regard clair sur l’essentiel".

Une simplicité et un essentiel que Benoît XVI a voulu imprimer sur chaque page de son livre "Gesù di Nazaret".


Une correspondance inédite

par Philipp Reisinger
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L’autrichien Franz Michel Willam est certainement la personnalité la moins connue aujourd’hui, parmi les auteurs cités par Benoît XVI dans la préface de son livre “Jésus de Nazareth”.
Qui était-ce? Et pourquoi le pape évoque-t-il son souvenir? Peu de gens connaissent la correspondance, conservée au couvent de Thalbach à Bregenz, en Autriche, entre celui qui était alors Joseph Ratzinger, professeur d’université, et Franz Michel Willam, plus âgé que lui de 33 ans.

Ils furent en contact étroit, notamment en 1967 et 1968. L’un des motifs de ces contacts était le livre de Willam “Vom jungen Roncalli zum Papst Johannes XXIII. [Du jeune Roncalli au pape Jean XXIII]”, publié en 1967, et l’article de Ratzinger “Was heißt Erneuerung der Kirche? [Que signifie la rénovation dans l’Eglise?]” paru un an plus tôt dans la revue “Diakonia”.

On trouvait dans ce dernier texte la phrase: “La vraie réforme est celle qui s’occupe de ce qui est authentiquement chrétien, qui se laisse interpeller et former par cela”. La vraie réforme, la vraie rénovation demande de la simplicité. “La Rénovation est simplification”: voilà comment Ratzinger résumait efficacement sa thèse.

Willam, qui avait découvert et mis en évidence la simplicité comme idée dominante chez le pape Jean XXIII, évoquait de la manière suivante – dans une lettre à l’évêque Paulus Rusch – ce qui constituait pour lui le passage central de l’article de Ratzinger:

“Voici comment se présente la théorie de la simplicité selon Joseph Ratzinger: il y a la simplicité de la commodité, qui est la simplicité de l’imprécision, un manque de richesse, de vie et de plénitude. Et puis il y a la simplicité de l’origine, qui est la vraie richesse. La rénovation est simplicité, non pas dans le sens d’une sélection ou d’une réduction, mais bien plutôt une simplification dans le sens de devenir simple, de se diriger vers cette vraie simplicité qui est le mystère de ce qui existe”.

Le 22 mai 1967, Willam écrit à Ratzinger:

“J’ai effectué une recherche sur les concordances dans les cinq volumes de discours et de documents du pontificat. Les mots ‘simple’ et ‘simplicité’ sont les mots-clés les plus fréquents. Jean XXIII leur donne certainement le même sens que vous: étudier la chose de manière précise et se demander: comment dois-je m’exprimer pour que tout le monde comprenne le résultat?”.

“J’ai reçu récemment votre livre sur le pape Jean XXIII. Je l’ai déjà parcouru et je le trouve vraiment émouvant”, répond le professeur Ratzinger après avoir reçu le volume.

Ratzinger, qui venait d’être nommé doyen de la Faculté de théologie de Tubingen, écrivit un compte-rendu long et particulièrement bienveillant du livre de Willam dans “Theologische Quartalschrift”, 6, 1968:

“On peut dire que ce livre est, de loin, la publication la plus importante, à ce jour, pour éclairer la personnalité de Jean XXIII. Il est également d’une importance fondamentale pour comprendre le Concile Vatican II. L’ouvrage est très au-dessus de la multitude de textes qui ont été écrits à ce sujet, parce que les informations sont très complètes et les rapprochements évidents. [...] L’auteur mérite donc d’être remercié sans réserves pour son patient travail, et aussi – ce n’est pas son moindre mérite – parce qu’il a su dire beaucoup en peu de pages”.

Willam a été vraiment heureux de ce compte-rendu, qu’il a cité dans presque toutes les lettres qu’il a écrites dans les semaines qui ont suivi sa publication. Il devait écrire à un ami: “On a l’impression que, dans son argumentaire, Ratzinger pense à différents dialogues qui ont eu lieu pendant le Concile Vatican II, y compris avec des non catholiques comme Oscar Cullmann”.

Willam admirait beaucoup le professeur Ratzinger et lui demanda conseil en de nombreuses occasions, se laissant corriger et conseiller par lui avec simplicité, malgré leur importante différence d’âge. Dans la lettre, déjà citée, du 22 mai 1967, il demandait notamment au professeur son aide pour une publication concernant John Henry Newman, et il concluait avec un compliment ému:

“Ne connaissant aucun théologien aussi proche que vous de Jean XXIII par la manière de penser – le mot-clé ‘simplicité’ que vous avez en commun en est un témoignage objectif – c’est à vous que j’adresse cette demande”.

La simplicité, si profondément décisive pour Willam, s’exprimait aussi par le fait qu’il ne s’est jamais senti appelé à formuler une théologie qui lui soit particulière. Il cherchait plutôt à recueillir les signes des temps et être témoin de l’éternel dans le contexte de tous les changements survenus au cours de sa vie.

Il y a là aussi un point commun avec Ratzinger, qui devait déclarer un jour:

“Je n’ai jamais chercher à créer un système particulier, une théologie spéciale. Je veux simplement penser en lien avec la foi de l’Eglise, c’est-à-dire penser en lien avec les grands penseurs de la foi. Il ne s’agit pas d’une théologie isolée et venant de moi-même, mais d’une théologie qui s’ouvre de la manière la plus large possible au chemin de pensée commun de la foi”.

[..]

Un biographe du pape Benoît XVI a écrit: “La simplicité lui appartient. Il n’a jamais été caractérisé par un détachement hautain, même lorsqu’il abordait des problèmes théologiques complexes”.

Le fruit de la simplicité, c’est un regard clair sur l’essentiel. C’est précisément cela que Willam partageait avec Ratzinger qui, en le citant dans la préface de “Jésus de Nazareth” le préserve à juste titre de l’oubli.


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