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LE RÉCIT D'ALEXANDRA BORGHESE
 

Alexandra Borghese a accompagné Benoît XVI en Turquie, comme journaliste accréditée auprès du Saint-Siège, et elle nous fait revivre le voyage heure par heure, en se bornant à relater les faits.
L'article est paru dans l'hebdomadaire italien "Gente" du 14 décembre dernier.
Il était illustré de nombreuses photos, qui se trouvent presque toutes déjà sur ce site (voir liens ci-dessous).

J'aime bien ce texte, récit très vivant, écrit simplement, manifestement avec le coeur...


 
 

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Note:
La princesse Alexandra Borghese, descendante d'une grande famille italienne, avait écrit au lendemain du 19 avril, dans le même hebdomadaire, où elle tient apparemment une rubrique,
un témoignage que j'avais beaucoup aimé, au point de le traduire.
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Devant les fidèles, le Patriarche orthodoxe lui lève la main en signe de victoire.

Au retour, il a dit: "Ce fut une expérience inoubliable".
A gauche, Benoît XVI libère une colombe blanche, signe de paix, dans le cloître de la cathédrale cdu Saint-Esperit, où il a célébré la dernière messe de son voyage pastoral.
Au centre, le Pontife, souriant, aux côtés de son secrétaire georg gänswein, à l'arrivée à l'aéroport romain de Ciampino. .
A droite, le Pontife, lors de l'Angelus dominical, où il a dit: "Ce fut une expérience inoubliable, tant du point de vue spirituel que pastoral".  
Agenouillé dans la chapelle de la Vierge.
Le Pontife prie dans la chapelle du couvent, à côté de la Maison d'Ephèse où la Vierge Marie passa les derniers jours de sa vie 
Il revient fatigué, mais heureux.
Le Pontife s'entretient avec les vaticanistes de sa suite, durant le voyage de retour vers l'Italie.
A la fin de la visite, les journaux turcs ont chanté les louanges du Pape 



In viaggio con il Papa

En voyage avec le Pape
"Le récit heure par heure de la visite pastrorale historique en Turquie"
Alessandra Borghese, "Gente" du 14 décembre 2006
Ma traduction

Durant l'Angelus du dimanche 3 décembre, ( Angelus du 3 décembre ) le Pape a rappelé son voyage en Turquie "comme une expérience inoubliable, tant du point de vue spirituel que pastoral". La douceur et le courage de Benoît XVI ont indiqué la possibilité d'un chemin ensemble, malgré la diversité des cultures et des fois religieuses.
Un message dont j'ai été témoin personnellemnt, durant les journée passées aux côtés du Saint-Père, lors du voyage pastoral qui s'est transformé en succès personnel de Papa Ratzinger.
Avec sa douceur, sa disponibilité et sa diplomatie, il a réussi à conquérir la population turque, et pas seulement elle. Un voyage commencé avec tant d'incertitudes et de peurs, s'est transformé en triomphe. Benoît XVI a démontré qu'il était prêt à changer son programme et son horaire, mais surtout qu'il était une personne ouverte, douce et bonne.

Durant ces quatre jours extrêmement intenses en terre turque, les évènement ont dépassé les attentes; et les faits, les paroles.
Les manifestations de protestation, les mannequins vêtus de blanc brûlés dans les rues, la haine envers "le croisé chrétien", qui aurait insulté l'Islam dans son discours de Regensburg en septembre, tout ce qui avait caractérisé la veille du voyage, a pu être rangé au rayon des archives, et beaucoup de préjugés se sont écroulés.
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( Voyage en Turquie, J1 ; Mini-video de la première journée )
Sur le vol Alitalia de Rome à Ankara, le Pape est venu saluer les journalistes. Il était visiblement fatigué, et certainement inquiet des nouvelles relatives aux protestations contre sa personne, qui avait transformé son cinquième voyage , plus que les autres, en thermomètre des relations entre l'Islam et l'Occident chrétien.
Avec une voix un peu enrouée, il nous rappelle le sens de ce voyage: "Pastoral, et non politique. Consacré à améliorer le dialogue entre les cultures, l'engagement commun pour la paix, et la fraternité entre les hommes".
Le premier ministre turc Erdogan, qui, des jours durant, avait exprimé son indifférence envers la visite du Pape ("Je n'ajuste pas mon agenda en fonction de celui du Pape", avait-il déclaré), a changé d'avis: avant de partir pour le sommet de l'OTAN à Riga, il accueille le Pape au pied de la passerelle, à l'aéroport.
L'hôte si embarassant se transforme ainsi en une personne attendue, et un instrument utile pour attirer l'attention de la communauté européenne, comme pour dire: "Voyez, même le Pape est d'accord avec notre entrée".
Durant la rencontre avec le professeur Ali Bardakoglu, la plus haute autorité religieuse turque, le Saint-Père rappelle que "Le dialogue inter-religieux n'est pas une option, mais une nécessité vitale, dont dépend, dans une large mesure, notre avenir".
Pour Benoît XVI "Un dialogue authentique entre chrétiens et musulmans est basé sur la vérité, et inspiré du désir sincère d'une meilleure connaissance réciproque, en respectant les différences et en reconnaissant ce que nous avons en commun".
Le programme de la visite est très serré. Sans une pause, le Pape se dirige vers la nonciature apostolique pour saluer le corps diplomatique. L'atmosphère commence à se faire plus détendue et familière. L'ambassadeur du Liban, aprèsles saluts protocolaires,conclut son discours par une question qui fait l'effet d'une bombe, dans la petite salle: "Si nous aimons DIEU? et si nous sommes tous enfants de Dieu, ne devrions-nous pas nous aimer les uns les autres?"
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( Voyage en Turquie, J2 )
Le lendemain matin, un avion de la Turkish Airways nous emmène à Ephèse. L'atmosphère populaire s'est graduellement réchauffée envers le pélerin venu de Rome avec pour seule arme la force de la parole. Sur les routes que nous parcourons a débuté l''histoire du Christianisme, et sa propagation.
Le Pape célèbre la messe à côté de la petite maison rectangulaire en pierre, où la vierge Marie, à la suite de Saint-Jean, aurait passé les dernières années de sa vie terrestre. Ce saint lieu est visité par environ 3 millions de personnes par an, parmi lesquelles beaucoup de musulmans, qui vénèrent Marie (Meryem) comme mère du prophète Jésus.
Le Pape est serein, il a un peu de toux, mais le professeur Renato Buzzonetti, son médecin personnel, me dit qu'il n'a pas voulu prendre de médicament. Devant la petite communauté accorue pour le rencontrer, dans la simplicité d'un lieu de foi blotti parmi les pins méditerranéens et les oliviers, il lance un appel pour la paix au Moyen-Orient. "Pour ceux qui vivent en une terre que nous appellons sainte, et qui est reconnue comme telle par les chrétiens, les juifs et les musulmans".
Tard dans l'après-midi, nous atterrissons à Istanbul, la voix de l'hôtesse dans le haut-parleur souhaite la bienvenue à Sa Sainteté, et ajoute: "Au revoir, et à après-demain"., jour du retour à Rome. Pour accueillir le Pape, outre les autorités catholiques, il y a le Patriarche Bartolomeo 1er, le patriache arménien Mesrob II, et le syro-orthodoxe Filüksinos. Ici, les mesures de sécurité sont impressionnantes, plus encore qu'à Ankara. Le cortège papal est constitué d'une soixantaine de voiture, y compris "pick-up" et engins blindés (?). Les rues latérales sont barrées, tous les deux cents mètres, il y a un policier, on a l'impression de traverser une ville - fantôme. Finalement, nous arrivons au Phanar, le Vatican orthodoxe, motif essentiel de cette visite apostolique. Les cloches sonnent en signe de fête, le Pape entre par une porte latérale, comme le font du reste tous les visiteurs, parce que la porte principale est fermée depuis 1821, quand les ottomans pendirent le patriarche d'alors, Gregorius.
Finalement, vers 20h30, le Pape arrive à la nonciature, connue de tous sous le nom de "maison Roncalli" - parce que c'est là que vécut le futur Jean XXIII losqu'il était nonce apostolique en Turquie- afin de passer la nuit.
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( Voyage en Turquie, J3 )
Le troisième jour du voyage, fête de Saint-André, patron de l'Eglise d'Orient, est le moment le plus important.
Après la liturgie dans l'église Saint-Georges, illuminée de candélabre en verre et or, Bartolomeo et Benoît XVI s'embrassent en signe de paix, puis ils bénissent depuis le balcon la petite foule rassemblée dans la cour du Phanar. Le patriarche lève le bras de Benoît avec le sien, les agitant vers le ciel en signe de victoire!
Peu après, dans le salon de réception, ils signent la déclaration commune attendue. Un programme qui trace les lignes d'un désir d'unité avec les orthodoxes, mais aussi une liste de choses à faire, parmi lesquelles la sauvegarde de la création, l'engagement à combattre la pauvreté, la guerre et le terrorrisme, parce que "tuer au nom de Dieu est une offense envers lui".

Dans la pénombre de cinq heures du soir, Benoît XVI visite Sainte-Sophie, l'ex-basilique désormais transformée en musée, et la mosquée bleue, la plus importante de Turquie. Les deux édifices sont encore plus illuminés que l'Autel de la Patrie, à Rome!
Précisémént à Sainte-Sophie, considérée comme la huitième merveille du monde, en 1054 eut lieu le schisme entre l'Orient et l'Occident.
Mais l'inattendu survient dans la plus magnifique mosquée du monde, avec ses six minarets (derrière La Mecque, qui en compte sept).
Le Pape se déchausse, et franchit le seuil. Ici, l'atmosphère est empreinte de recueillement et de spiritualité. Le Mufti d'Istanbul, Mustafa Kagrici, qui accompagne le Pontife, propose un moment de prière. Le Pape ne se dérobe pas, avec le courage de la foi, il ferme à demi les yeux, il s'approche du Mihrab, la partie qui indique la direction de La Mecque, et se recueille pendant quelques minutes, avec les mains posées l'une sur l'autre, la croix pectorale bien visible et brillante. Un geste important, de respect et d'amitié, qui restera imprimé davantage que bien des paroles, dans le parcours futur du dialogue inter-religieux.
Un acte d'amour, cohérent avec le concept de respect prêché par Benoît XVI, même s'il ne signifie pas que toutes les religions se valent.
Avant de quitter la mosquée, le Pape s'adresse au Mufti: "Que le Dieu Miséricordieux nous aide à trouver le juste chemin du dialogue et de la fraternité, si nécessaires en ces moments".
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( Voyage en Turquie, J4 )
Le jour suivant, après la messe célébrée dans la cathédrale du Saint-Esprit, pour la petite communauté catholique, le Pape libère trois colombes, autre symbole visible de paix et d'espérance.
Les journaux turcs consacrent leur première page au Pontife ami.
Un voyage important pour beaucoup de motifs, dont le moindre n'est pas de redonner vigueur à l'espoir, parfois chancelant devant la haine et les vengeances aveugles.
Le Pape, sur la pointe des pieds, nous a montré comment faire pour vivre en paix, en se respectant l'un l'autre.