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LE MONDE MINIMISE LE RÔLE ET L'INFLUENCE DU PAPE

Derniers articles du Monde.

Comment minimiser le rôle du Pape: en faisant semblant de mettre sur un même plan ce qui ne peut pas être comparé. C'est-à-dire en prétendant réduire l'influence du premier leader spirituel de l'Occident -grand esprit incontesté et incontestable- dans le débat des idées sur la scène mondiale à celle d'un intellectuel lambda.

Hans Kung = Joseph Ratzinger. Ou encore, Mustapha Chélif = Benoît XVI.
Voilà les deux équations qui introduisent cette nouvelle théorie. Aux yeux de Dieu, c'est peut-être vrai. Mais ceux qui l'écrivent ne sont pas Dieu.
En tous cas, c'est la dernière trouvaille d'Henri Tincq, dont on se demande s'il n'aimerait pas ajouter son nom dans le membre de gauche d'une de ces équations.
Il en abuse, et en voici les ultimes avatars.

Le premier est un article paru le 13 novembre, sur Hans Kung, décidément très à la mode - il semble qu'il soit sur le point de publier le second tome de ses mémoires chez Plon, l'argument est donc peut-être banalement mercantile. Le second article, daté d'aujourd'hui (15 novembre) relate et commente la visite que "l'intellectuel musulman" Mustapha Chérif a rendu récemment à Benoît XVI. (voir ici son blog)
Je note sans déplaisir que Tincq, "leader" du commentaire théologique dans la presse française est très modestement réactif: dans les deux cas, il a été largement pris de vitesse. Serait-il à court d'idées, pour ainsi s'étendre sur de tels "non-évènements" (l'article sur le théologien "ami" du Pape est d'ailleurs une enfilade de lieux-communs).
En tous cas, sa malveillance est intense, j'e suis permis de souligner certains passages, et de rajouter des commentaires en italique, tout en remarquant que les deux intellectuels auxquels Tincq s'identifierait volontiers manquent singulièrement de modestie, et, en ce qui concerne le premier, de charité chrétienne.


Hans Küng: l'autre cerveau de l'Eglise

[Ndr: le titre de l'article est déjà tout un programme!]
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Deux faux jumeaux, (quel lieu commun!) en fait, et pas seulement à cause de leur origine, bavaroise pour Ratzinger, suisse pour Küng. Le premier a fait une carrière sans faute dans l'Eglise. Le deuxième a été sanctionné (il semblerait qu'il ait tout fait pour cela) en 1979 par le Vatican, interdit d'enseignement pour un livre subversif sur l'infaillibilité du pape, et il est devenu le plus féroce adversaire de Jean Paul II.
Les deux hommes se connaissent par coeur, s'épient à distance, s'estiment, se jalousent. (il serait plus juste de dire que Küng épie et jalouse le Pape: je vois mal ce que ce dernier aurait à jalouser chez l'autre, si tant est qu'un tel sentiment fasse partie de son système de pensée)
Elu pape, l'un des premiers gestes (vraiment? n'est-ce pas présomptueux, lorsqu'on songe à tous les engagements auxquels il a dû faire face à ce moment) de Benoît XVI sera d'inviter à Castelgandolfo son ancien collègue. Ils ne s'étaient pas revus depuis... 1983. Pendant quatre heures, Küng et Ratzinger ont parlé sans tabou, marché, ri, évoqué les défis de la science, le dialogue des religions, etc.
....

Mais sa statue d'enfant terrible de la théologie l'encombre : "Les controverses sur le célibat des prêtres, l'infaillibilité du pape ou l'ordination des femmes m'ennuient. On connaît mes positions. La décision ne m'appartient pas. Un jour, un pape la prendra en disant qu'il y avait toujours pensé !" (ce pape-là, s'il vient un jour, peut-être: mais un pape est avant tout un principe, et pas seulement un homme: les affirmations soit-disant prophétiques de Kung n'ont donc aucun sens).
...
En revanche, le dialogue des religions est devenu sa drogue. C'est, pour lui, le radeau de survie de l'humanité. Küng est régulièrement à Berlin, Moscou, Téhéran, Riyad, New York, Pékin, Séoul, Mexico, pour développer son projet d'ethos planétaire, ses applications à la science, à l'armement, à la technologie, aux religions.
Il est sévère avec les trois monothéismes également rivés au "paradigme médiéval" : le catholicisme avec sa papauté et son système clérical; le judaïsme orthodoxe avec son étroit système rabbinique ; l'islam avec sa charia. Le monde ira mieux quand ces religions auront atteint le "paradigme de l'âge moderne". ...(et lui, à quel religion appartient-il?)

Ce savant ne déteste rien autant que l'ignorance. A la fois séducteur et carnassier, il peste contre le discours de son ami Ratzinger à l'université de Ratisbonne : "On n'a pas le droit de parler de la grande figure de Mahomet sans avoir rien lu sur l'islam !" (c'est un comble, d'oser taxer le Pape d'ignorance! Je serais d'ailleurs très étonné qu'il ait prononcé ces mots, il est trop intelligent pour cela, c'est plutôt du Tincq dans le texte)
C'est lui, comme doyen de Tübingen, qui était allé chercher le futur pape pour enseigner la théologie dogmatique. Et là qu'ils ont divergé. (le Pape serait donc son débiteur? Très étonnant, mais affirmation sans risque, puisque ce dernier ne le contredira pas)

Ratzinger en serait resté à la théologie "des Pères et du Saint-Père", c'est-à-dire à une tradition figée et au système de papauté : "Il n'a jamais travaillé la théologie de la Réforme ni l'exégèse historico-critique du Nouveau Testament, déplore Küng. Comment ose-t-il aujourd'hui faire la leçon aux musulmans sur la raison ? Vous croyez que, pour eux, notre religion chrétienne, avec son Dieu fait homme et son Dieu en trois personnes, est une religion rationnelle ?" (et lui, comment ose-t'il faire la leçon au Pape?)

Il dément en partie les informations selon lesquelles lui faisait amphi comble à Tübingen, alors que le professeur Ratzinger était chahuté : "Il avait aussi du succès. Mais après Mai 68, face aux étudiants d'extrême gauche, il a eu peur et est parti. Moi, j'étais aussi choqué, mais j'empoignais le micro et je me battais." (Le Saint-Père s'est expliqué là-dessus dans un livre d'entretiens, et il a clairement dit qu'il n'avait pas été chahuté: on peut donc le croire)

Il a gardé de la tendresse pour lui, mais de la haine pour son prédécesseur qui, en vingt-six ans de règne, l'a ignoré, n'a jamais réagi à un seul envoi de lettre ou de livre : "Jean Paul II était un homme de coups médiatiques, toujours sur la scène. Comme Reagan."(de la haine???)

Dans ses Mémoires, il révèle avec cruauté que la formation théologique de Karol Wojtyla était "si étroite" que le futur Jean Paul II avait été recalé comme doctorant à l'université grégorienne de Rome (on reste confondu devant tant de méchanceté!). Et il appuie sur la plaie : "Ce pape a condamné des théologiens qu'il ne connaissait pas.
...
Ils ne se sont pas seulement revus. Ils s'écrivent.(????)
Le nouveau pontificat le surprend-il ? Rire : "Non, jusqu'ici, la seule surprise, c'est qu'il a osé me recevoir ! Mais je ne peux pas m'imaginer qu'un jour, il ne fera pas un acte courageux, là où des gens souffrent, par exemple en faveur des divorcés-remariés écartés des sacrements. S'il ne le fait pas, il ne restera aucune trace de lui dans l'histoire." (là, je m'abstiens de commenter, appelons cela auto-censure...)
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Décidément, ce Kung est bien antipathique, l'impression que m'avaient laissé ses réponses à Elkabach n'était pas fausse.
Hans Kung, un ami qui ne lui veut pas de bien


Le pape consulte sur l’islam

Avant son voyage en Turquie, le pape consulte sur l’islam
Publié le Mardi 14 novembre 2006

De peur de rééditer en Turquie - où il se rendra du 28 novembre au 1er décembre - la mésaventure de son discours de Ratisbonne (encore cette idée insupportable et fausse que le Benoît XVI aurait fait là-bas une bourde!), le pape peaufine sa connaissance de l’islam.
Il a invité pour la première fois en tête à tête, samedi 11 novembre, dans sa bibliothèque privée du Vatican, un intellectuel musulman, l’Algérien Mustapha Cherif, 50 ans. (en fait, il ne l'a pas invité, il l'a reçu à sa demande, ce qui est très différent, l'article le dit d'ailleurs un peu plus loin. Je crois aussi qu'il serait plus approprié de dire que le Pape s'informe sur l'Islam)

Celui-ci n’est ni théologien ni chef religieux. Il fut l’élève de l’islamologue Jacques Berque (1910-1995) au Collège de France. Philosophe, il enseigne à l’université d’Alger, après avoir été ambassadeur en Egypte et ministre de l’enseignement supérieur.

En mai, sans illusion, il envoie à Benoît XVI son ouvrage L’Islam et la tolérance (Odile Jacob). Sa surprise est grande quand il reçoit une réponse en forme d’invitation. Et, en septembre, après la controverse de Ratisbonne, il relance le pape. Récompensé pour son obstination, il obtient un rendez-vous ferme transmis par le nonce apostolique à Alger.

Cette rencontre n’a fait l’objet d’aucune publicité du Vatican. Les deux hommes se sont convaincus mutuellement (incroyable, cette symètrie exacte de leurs rôles qu'on prétend nous imposer: le chef spirituel de plus d'un milliard de catholiques, et un obscur "intellectuel" autoproclamé) de l’urgence d’un dialogue pour faire reculer la méconnaissance et le fanatisme. “J’ai dit au pape, rapporte M. Cherif, qu’il ne faut pas confondre les quinze ans d’agissements d’une infime minorité d’intégristes et les quinze siècles d’une histoire commune, malgré des épisodes sombres, entre islam et christianisme.” (c'est le discours qu'on nous rabâche: en gros, "pas d'amalgame", il n'est donc pas étonnant qu'il reçoive un écho dans la bible du politiquement correct qu'est Le Monde)

M. Cherif se veut le représentant de la “majorité silencieuse” des musulmans qui rejettent la “dissolution” de leur foi dans la modernité autant que sa “fermeture”. Il a rappelé à Benoît XVI que “le Coran, comme l’Evangile, demande aux croyants de pardonner” et que “le recours à la violence n’est autorisé qu’en cas d’agression et dans des conditions strictes. C’est ce que disait aussi saint Augustin.” Le pape a répondu : “Nous sommes alliés, non concurrents. Nous avons besoin de fraternité et d’une pensée objective et critique.”

Ils ont réfléchi à deux propositions (encore cette idée choquante de symétrie): un colloque entre croyants, à Rome ou à Genève, sur la haine religieuse ; une pression sur la communauté internationale pour qu’elle condamne - dans le respect de la liberté d’expression - les offenses contre les symboles sacrés des religions. M. Cherif a remis au pape une lettre de l’émir Abdelkader (1808-1883) à l’archevêque d’Alger, dans lequel il explique au prélat - qui le remerciait d’avoir sauvé des prêtres catholiques - que cela faisait partie de la pratique de l’islam. Autre temps, autres moeurs ?

Henri Tincq
Article paru dans l’édition Le Monde du 15.11.06
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Bref, on aura compris que l'Islam est une religion de paix et de tolérance. Mais qui en doute???
Et aussi (c'est la tonalité des 2 articles) qu'il est grand temps que le Pape retourne à l'école, ainsi que l'avait écrit Michel de Poncins...)


 

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Les faux-tout | Novembre 2006