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HANS KUNG, UN AMI QUI NE LUI VEUT PAS DE BIEN

Elkabach fait un mini-conclave.

... Il en est l'unique électeur, et il choisit son Pape: Hans Kung

Ayant encore cité récemment un article d'Henri Tincq, je croyais avoir tout dit sur le traitement médiatique réservé à la Religion Catholique en général, et au Pape en particulier. Mais non... il faut croire que le pire reste encore à venir.

Jean-Pierre Elkabach, depuis qu'il a reçu Chirac dans les studios d'Europe 1, dont il est le PDG , avant le départ de ce dernier pour un sommet de l'ONU, et qu'il organise sur la chaîne du Sénat, qu'il dirige également, les débats socialo-socialistes, a de plus en plus tendance (à quel titre???) à se prendre pour l'"homme le plus puissant de France", une sorte de gourou, qui fait ou défait les présidentiables, et canonise ou jette l'anathème au gré de ses mystérieuses amitiés.

Donc, écoutant ce matin Europe 1, j'apprends qu'il reçoit aujourd'hui pour son interview quotidienne le théologien Hans Kung.
En dehors d'un petit cercle d'initiés, c'est un homme peu connu (en tout cas il ne l'est pas par le journaliste obscur qui annonce péniblement "Jean-Pierre Elkabach va recevoir le théologien Hans "Kroung"), donc l'audimat -argument commode de ceux qui ont décidé de se boucher les yeux sur la désinformation- ne peut être en aucun cas la justification de cette invitation. Mais c'est une habitude d'Elkabach.

Je sais qu'on peut prendre du recul par rapport aux mensonges médiatiques, rester calme, être "tolérant" (toujours dans le même sens, hélas!), relativiser, et même chercher le bon (bien caché, quand même!!).
Mais quand on commence par nous présenter Hans Kung comme un ami, ou un proche de "Joseph Ratzinger" (le mot "pape" semble écorcher la bouche délicate d'Elkabach, sinon accompagné d'un ricanement entendu), là, vraiment, j'ai du mal à surmonter mon indignation. Car Hans Kung est pour Benoît XVI tout, sauf un ami (trop intelligent pour se comporter en ennemi déclaré, il n'en a pas moins contribué à alimenter la campagne de calomnies consécutive à l'élection d'avril 2005).
Qu'on me comprenne bien, je ne cherche absolument pas ici à discréditer Hans Kung, qui m'indiffère. Il est probable qu'il se donne le beau rôle, et amplifie son influence réelle, d'hier et d'aujourd'hui, mais comment lui reprocher de profiter du rôle flatteur que le monde médiatique a décidé de lui faire jouer, celui d'un alter ego gauchisant du Saint-Père, mais également d'une sorte de Gaillot au niveau mondial, plus intellectuel, lui aussi susceptible d'ébranler l'Institution Eglise de l'intérieur?
Ce qui me fait horreur, c'est son instrumentalisation par un journaliste très influent, dont nul ne peut ignorer (il en fait suffisamment étalage) qu'il n'est ni catholique, ni même chrétien. Sans doute tient-il à se faire passer pour un "homme de bonne volonté", mais son opinion n'engage que lui sur ce point.

Voici quelques extraits de l''interview, que j'ai essayé de noter (j'ai parfois rajouté mes commentaires en italique, mais ils sont la plupart du temps inutiles) .
On peut par ailleurs la réécouter sur le site de la station: (mardi 8 novembre 2006, tranche 8h-10h)


 

E: Hans Kung, vous êtes un proche de Joseph Ratzinger, vous êtes sans doute le plus grand théologien vivant, l'un des plus importants du XXème siècle.
D'emblée, cette seconde affirmation laisse perplexe: est-ce une simple flatterie, ou une opération de promotion pour un livre qui va sortir chez un éditeur d'un groupe ami? et qui peut décider qu'untel est le plus grand théologien vivant? Il est d'ailleurs étrange que cette "décoration" soit décernée par un non-chrétien, à un théologien dissident, qui ne semble plus guère croire en Dieu, en rupture ouverte avec la hiérarchie catholique, et donc avec le Pape, qui peut lui aussi prétendre à plus juste titre à cette "distinction".

E: Est-ce que l'Eglise est en crise?
K: Après Vatican II, on a cessé le renouveau, on a tout bloqué...
De quoi se même Elkabach? Je ne suis d'ailleurs pas si sûre qu'on ait "bloqué" quoi que ce soit. Il suffit de considérer l'évolution de l'Eglise en France, durant la dernière décennie: voir ici

E: L'autre expert [HK] du Concile Vatican II était Joseph Ratzinger (ricanements)
N'y avait-il que deux experts???

E: L'Eglise a-t'elle besoin d'un nouveau concile? (Benoît XVI s'est exprimé de façon très claire à ce sujet, c'est la dernière chose qu'il souhaite, mais sans doute E estime-t'il que Hans Kung est en mesure de le décider personnellement).
Doit-elle traiter surtout des questions de société?
K: Les laïcs et le clergé n'ont rien à dire dans la nomination des évêques.
Ceci n'est pas certain, en ce qui concerne l'épiscopat local, qui a certainement son mot à dire. C'est une manière de faire passer la hiérarchie catholique pour une dictature. Rappelons qu'en France, sous la Révolution, la Constitution Civile du Clergé votée en 1790 par l'assemblée constituante, stipulait que "les évêques et les curés doivent être désignés par les électeurs de leur paroisse ou de leur diocèse, que ces électeurs soient catholiques, athées, protestants, voltairiens...et que le pape n'a plus d'avis à donner sur ces nominations". Donc une application grandeur nature des revendications de Hans Kung. Il me semble me rappeler que tout ceci s'est très mal terminé, le Roi l'a payé de sa tête, et beaucoup de prêtres catholiques ont subi le martyre, épisode tristement occulté par l'histoire officielle.

E: Vous avez dénoncé le pouvoir absolu du Vatican... l'ennemi, c'est la Curie
K: C'est une institution médiévale... Vous avez eu la Révolution française, mais elle n'a pas atteint la Curie.

E: Le mur de Berlin est tombé, le mur de la Curie, le mur du Vatican, non! (ricanements)
Oser comparer le régime communiste et l'Eglise Catholique, il faut le faire!! Il faut aussi dire que c'est sans danger.
On ne peut que demander: pourquoi tant de haine?


E: Depuis toujours, vous contestez l'infaillibilité du Pape... Du côté du Vatican, ça doit être difficile à avaler.

E: Jean-Paul II qui va être béatifié, sanctifié (sic!), en tout cas, pas par vous, vous dites qu'il n'a rien fait pour dégeler, pour ouvrir l'Eglise...
K: A l'extérieur, il a fait des choses, pour les relations avec le judaïsme et l'Islam... les droits de l'homme... mais à l'intérieur, il les a tous supprimés, avant tout les droits des femmes.
Jean-Paul II a supprimé les droits des femmes, qu'il oppose aux "droits de l'homme"!!!!!!

E: Jean-Paul II, pape adulé par les foules, a tué toute vie dans l'Eglise, et réduit au silence les contestataires...
Des mots très forts, qui ne sont sans doute pas choisis au hasard, et permettent de faire passer l'Eglise pour une organisation totalitaire.

E: Vous connaissez très bien Joseph Ratzinger. En 1965, vous étiez avec lui au concile.... et en 1968, il va poursuivre son destin vers le Vatican.
On peut se demander pourquoi vous n'êtes pas devenu cardinal...
Manifestement, E ignore tout de la biographie de Joseph Ratzinger, qui n'a nullement poursuivi son chemin vers le Vatican en 1968. A cette époque, il obtient un poste à l'Université de Ratisbonne, où il espère finir sa carrière de professeur, il s'y fait même construire une maison.

E: A l'époque, Ratzinger passait pour un théologien doué et progressiste, "un jeune loup de la révolte de l'Eglise"
On frôle l'insolence. Et que répondre à de pareilles inepties caricaturales? Deux mondes se croisent mais ne peuvent pas se comprendre...

E: Est-il maintenant le Pape Benoît XVI, peut-être un pape d'extrême droite? Ou est-il encore Joseph Ratzinger?
On voit où se situe l'obsession principale d'Elkabach. La première des deux options serait carrément calomnieuse, hors de ce contexte. N'y en a-t'il donc aucune autre? Par exemple, le vicaire du Christ?

E: Quand vous étiez ensemble (HK a été reçu en privé à Castelgandolfo, à sa demande, par le Saint-Père, en septembre 2005) il vous a écouté?... Va t'il réformer l'Eglise?
K: Je serais très content s'il faisait un acte courageux: ... corriger l'Encyclique Humanae Vitae pour la pillule, ou s'il disait quelque chose sur le condom en Afrique...
Décidément, le préservatif et la pillule, pour ces gens, c'est une autre obsession. Vu les positions très fermes que le Pape ne cesse de proclamer sur les questions d'éthique, il est très vraisemblable que Kung sera "déçu" aussi sur ce point.
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La conversation se poursuit avec un intérêt moindre, Elkabach en revenant inévitablement à l'unique question qui l'intéresse: la situation au proche-orient (au passage, Hans Kung nous apprend qu'il est un grand ami de l'état d'Israël depuis le Concile, et qu'il a beaucoup fait pour cela).
Et se conclut par des propos encore une fois à la limite de l'insolence:
"Vous faites confiance à votre ami Ratzinger, devenu Benoît XVI? ....
La bataille pour la liberté, de la liberté, continue. Pour vous, pour nous tous".
Que voilà une "bataille" sans risque! Et très "porteuse" . Beaucoup l'ont compris, parmi ceux qui ont le droit de s'exprimer. Cela me fait penser à une chanson de Brassens, déjà évoquée dans ces pages ("Mourir pour des idées", voir ici: Récupération de Georges Brassens? )
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Un auditeur non averti qui aurait écouté superficiellement, comme c'est le cas en général por ce genre d'émission, pourrait croire qu'Europe1 se soumet pleinement aux règles déontologiques, et pratique le pluralisme, en donnant la parole à un catholique, et même à un "proche" du Pape!
Pire, la dimension sprituelle -la seule qui compte- de la mission du Saint-Père a été volontairement, scandaleusement et totalement occultée.
Je ne sais pas si cette misérable émission valait le temps que j'ai passé à la transcrire et à la commenter.
Même l'alibi du niveau intellectuel de l'intervenant ne tient pas. S'exprimant péniblement en français, une langue qu'il maîtrise mal, face à un interlocuteur qui, lui, usait selon son habitude d'une langue familière, et même négligée (preuve du mépris dans lequel il tient ses auditeurs) Hans Kung s'est révélé un piètre débateur, maladroit et peu convaincant.

Bref, il s'agit d'une synthèse (cf Michel Audiard...) et ce, sur plusieurs plans. C'est à ce titre uniquement que l'émission peut susciter l'intérêt.


A propos de Hans Kung

Voici un extrait de l'article que lui consacre Wikipedia:
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« Pour lui, les différentes religions sont l'expression de la légitime religiosité de l'homme. Elles sont ou devraient être au service de l'homme et ne devraient être que des aspects secondaires d'une éthique humaine, et donc mondiale (la "Weltethik"), plus fondamentale, où - finalement - Dieu est au service de l'homme.

Il se dévoue depuis déjà 1993 à la fondation "Pour une éthique planétaire" (Weltethos) qui cherche à développer et renforcer la coopération entre les religions au delà d'une vague reconnaissance des valeurs communes».
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Ces points sont clairement en désaccord frontal avec le magistère du Pape, pour qui l'Eglise n'est pas au service de l'homme, mais de Dieu.
Le théoricien de la Weltethic impliqué dans un bidule mondialiste (Weltethos) mérite bien à ce titre son invitation par Elkabach, qui se présente volontiers comme un fervent zélateur d'une certaine forme de syncrétisme religieux...
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