A l'occasion de la visite du Saint-Père en Turquie, Le Pélerin lui consacre un dossier.
L'article ci-dessous, publié sur le site du journal, fait le point sur les enjeux du voyage.

Benoît XVI en Turquie

Après les remous suscités par ses propos sur l'islam et son opposition à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne, Benoît XVI devrait préciser sa vision des relations avec la religion musulmane...

Un voyage pontifical à visées œcuméniques ? Sans aucun doute puisque Benoît XVI se rend en Turquie d’abord sur l’invitation du patriarche Bartholomée Ier avec le souci de rapprocher encore les Eglises catholique et orthodoxe.

Mais le discours du Saint-Père sur les rapports entre l’islam et la violence, prononcé à Ratisbonne (Allemagne) le 12 septembre dernier, a bouleversé la donne. Du coup, les relations avec l’islam deviennent l’autre grand enjeu de ce premier voyage pontifical hors d’Europe.

Quel accueil Benoît XVI trouvera-t-il sur les rives du Bosphore ? En Turquie, pays à plus de 99%musulman, les propos du Saint-Père ont suscité, dans un premier temps, de vives réactions. Aujourd’hui, la situation semble apaisée et la population affiche une relative indifférence à quelques jours de la venue du pape.

Sur le fond, le Saint-Siège affiche sans ambiguïté son désir de « continuer le dialogue » avec l’islam. Mais quel dialogue ?Interreligieux ou interculturel ? Une question sur laquelle Benoît XVI, qui doit rencontrer le grand mufti de Turquie, est plus attendu que jamais.

Le pape avait déjà, en mars 2006, placé sous la même présidence – du cardinal Paul Poupard – le Conseil pour le dialogue interreligieux et le Conseil pontifical pour la culture, suscitant l’étonnement de nombreux spécialistes du dialogue islamo-chrétien.

Pour le Vatican, ce réaménagement – provisoire ? – de la curie traduit la volonté de « favoriser un dialogue plus intense entre les hommes de culture et les représentants des différentes religions ». Le voyage de Benoît XVI permettra sans doute de clarifier sa vision des futures relations entre l’Eglise et l’islam.

Cette mise au clair intervient sur fond de divergences à propos de l’entrée de la Turquie dans l’Europe. Profondément attaché aux « racines chrétiennes » du Vieux Continent, comme son prédécesseur Jean-Paul II, le futur Benoît XVI avait, en 2004, jugé « antihistorique » et qualifié de « grande erreur » l’éventuelle adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Des paroles que les Turcs, aujourd’hui engagés dans un long processus de négociations, n’ont pas oubliées.

La question sera-t-elle directement abordée au cours de ce voyage qui pourrait avoir lieu en l’absence du premier ministre turc, Recep Erdogan, retenu à Riga (Lettonie) pour cause de sommet de l’Otan, les 28 et 29 novembre ?

Nul doute qu’au cours de ces quatre jours, les déclarations du pape seront l’objet d’une attention toute particulière en Turquie et dans l’ensemble du monde musulman.

Samuel Lieven