L'historien musulman Rochdi Alili (Analyse musulmane sur oumma.com ) continue son étude critique du discours de Ratisbonne:
http://oumma.com/

Il développe donc de longues et savantes considérations rhétoriques; on est à des années-lumières du style simple et dense de Benoît XVI, qui cherche passionément à être compris; lui peut être quasiment certain que le côté "réservé aux initiés" de son texte, qui noie son interlocuteur sous le flot d'une érudition cherchant à écraser (à l'inverse de celle de notre Pape), ne trouvera aucun contradicteur, ce qui l'autorise à dire à peu près n'importe quoi, mais je laisse des gens plus savants démêler le vrai du faux, s'ils en ont l'envie, et surtout le courage, car c'est vraiment pénible à lire.

On a donc droit au rappel insistant de " la contribution de la philosophie islamique à l’essor de la culture européenne", et des circonstances qui amènent, au début de ce millénaire, " les clercs les plus avancés... à la recherche de techniques nouvelles, d’outils intellectuels, de méthodes de réflexion et de pensée à puiser dans un capital culturel plus riche. Ils trouvent ce capital dans le monde musulman"

C'est peut-être en partie vrai. C'est peut-être aussi en partie (plus grande!) faux. Je n'en sais rien, même si on peut être perplexe, au vu des résultats.(*)

Je note encore en vrac ces affirmations édifiantes, dont chacune est un manifeste de rejet pour notre civilisation!
- " pas de curiosité pour l’autre, mais une vaste opération de captation systématique du savoir musulman utile à l’Eglise.",
- " méfions nous du mythe andalous. La réalité fut moins idyllique, mais enfin, l’Islam avait-t-il au moins le mérite de tolérer les autres, ce qui n’est pas dans l’habitude historique de longue durée de l’Europe chrétienne."
- "cette éducation par des penseurs arabo musulmans d’une Europe qui se construit alors son identité nouvelle en incorporant par leur truchement l’héritage antique, ne manque pas de procurer une contradiction majeure dans des mentalités chrétiennes qui ont évolué depuis le haut Moyen-âge dans le rejet de l’islam."
etc...

Bref, "nous" les avons pillés, et "nous" leur devons tout, mais "nous" ne le savons pas encore. Gageons qu'ils vont faire en sorte que nous soyions informés.
Je ne peux m'empêcher de comparer avec l'hystérie médiatique qui a entouré la sortie du film Indigènes, je ne suis pas sûre que c'est hors-sujet.
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(*) Au sujet de ce qu'il est convenu d'appeler L'âge d'or de l'Andalousie musulmane, lire ici: L'âge d'or de L'Andalousie
Ne disposant pas de temps pour étudier à fond une question qui ne me passionne pas, je n'ai pas plus de moyens de contrôler la véracité des faits exposés ici sur le blog "conservateur" bafweb (que je ne m'approprie donc pas), que les thèses défendues par R. Alili. Ce sont les limites d'Internet. Qui prouvent aussi, si c'était nécessaire, qu'il y a au minimum matière à débat.
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[Dans le paragraphe suivant, mes commentaires sont en italique].

Après ce long pensum, qui n'est intéressant que par ce qu'il laisse deviner, on en arrive à la conclusion -elle même fort longue (une pensée vraiment forte n'aurait pas besoin de développements aussi interminables, et se passerait d'un jargon aussi abscons):
On ne peut s'empêcher d'y lire entre les lignes des menaces à peine implicites:
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J’ai peur d’être péremptoire mais ce qu’a dit le pape peut apparaître extrêmememt inopportun et inquiétant aux musulmans de raison. (il renverse les rôles!)
...
ce qui me paraît extrêment inquiétant dans le discours de Benoit XVI, parce que c’est un véritable acte politique, c’est sa définition de l’Europe qui conclut cette partie du texte. Cela m’inquiète parce que le pape, avec cette vision national confessionaliste, (on est dans le subliminal, mais l'allusion n'en est pas poins transparente!) s’inscrit très logiquement ...dans un acquis sophistiqué, constitutif de la culture européenne, un acquis élaboré philosophiquement, un acquis fondateur de l’identité de l’Europe à l’époque moderne...

Par un paradoxe qui n’est qu’apparent, cette posture papale, très cohérente hélas avec sa culture de théologien européen et chrétien, (bientôt, on va repprocher au Pape d'être chrétien) donne indirectement droit de cité à une autre perception en termes de national confessionalisme, celle de l’islamisme radical, qui pourrait parfaitement reprendre, sur d’autres ressorts rhétoriques, la même définition de l’Europe et en tirer toutes les conséquences logiques et fâcheuses pour confirmer ses rejets. (voici des menaces à peine voilées: si je comprends bien, on légitimise par avance les pires exactions du prétendu "islamisme radical")

Dès lors, ceux qui peuvent se sentir les plus oubliés dans tout ce discours, ce sont les musulmans majoritaires, les musulmans de raison et de dialogue, encore une fois pris sous les feux de deux paranoïas opposées (il faut oser mettre sur le même plan les chrétiens d'aujourd'hui, et les terroristes musulmans). Car enfin, malgré les bonnes paroles de tous, ils ne sont jamais pris en considération, ni par le pape, (le Pape n'a aucune raison de s'adresser aux musulmans, pourtant, c'est ce qu'il a tenté de faire à Ratisbonne, et le moins que l'on puisse dire est qu'il a trouvé peu d'échos) ni par les politiques, ni par les organes d’information, et les plus négligés restent sans doute les Euromusulmans, qui savent bien, eux, que l’identité de l’Europe est nécessairement appelée à évoluer, tenant compte de facteurs désormais en jeu depuis des décennies.
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Notre musulman "modéré" a alors un argument de poids (le seul qui soit vraiment pragmatique dans ce magma), auxquels nos dirigeants irresponsables et démagogiques feraient bien de réfléchir avant qu'il ne soit trop tard: la démographie (cela renvoie aux propos attribués à Bouteflika "nous vous vaincrons avec les ventres de nos femmes")
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Je soulignerai le plus important, le plus capital de ces facteurs, que tous les gens avisés voient venir, mais qu’aucun politique ne tient en compte sérieusement ; le facteur démographique aussi essentiel que le réchauffement climatique et aussi inexorable. Je veux parler du vieillissement du continent européen face à un monde musulman qui va sans doute achever sa transition démographique dans la zone méditerranéenne, mais a capitalisé des masses de populations jeunes. S’il fallait définir l’Europe aujourd’hui, je dirai plutôt que c’est un continent avec de plus en plus de vieux, un continent égoiste et aveugle. S’il fallait définir l’Islam aujourd’hui, je dirai que c’est une masse considérable de jeunes, impatients et révoltés du rejet multiforme et réitéré qu’ils subissent
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(Question "fermée" de l'interviewer) ...ne trouvez vous pas gravissime cet enfermement sur la définition papale de l’identité européenne ?

Bien sûr, et tout doit tendre, je pense le dire depuis assez longtemps, à opérer une articulation harmonieuse entre l’Europe, non pas chrétienne, mais dramatiquement vieillissante et un monde musulman submergé de jeunes.

...le pape serait d’un apport considérable à la paix des peuples s’il pouvait faire un signe clair, encourageant la rencontre de l’Islam et de l’Europe, sur la base d’une définition ouverte et actuelle de l’identité européenne. Il le serait de même s’il donnait droit à l’idée d’un projet unissant autant que faire se peut, en tenant compte des réalités, les pays musulmans de la Méditerranée et l’Europe, et enfin en ne restant pas silencieux face aux politiques d’enfermement et de fortification qui se multiplient à l’heure actuelle.
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Il termine en invoquant les mânes de jean-Paul II: il faut oser!!!!

Souhaitons que la grande ombre de Jean Paul II vienne le visiter et lui dire : « N’ayez pas peur ! » ; ainsi la hiérarchie vaticane, sans rien résilier de ce qu’est profondément l’Eglise, s’ouvrira peut être au XXIe siècle et comprendra vraiment les enjeux du monde dans lequel il lui faut se perpétuer.

Finalement, si on veut la paix, il faut les laisser nous envahir. De préférence avec la bénédiction du Pape!!! (quelle meilleure façon de le discréditer par le mépris, lui et la civilisation honnie qu'il porte! ) Et ils nous envahirons de gré ou de force, ne serait-ce que par leur démographie, c'est lui-même qui le dit.

@ En guise de réponse, si l'on veut, ce billet du blog de Bernard Antony: 10 questions à Dalil Boubakeur

@ Et un extrait du livre de Jean Sévilla "Historiquement correct" : L'âge d'or andalou

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