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... avec l'Abbé de Touärn (21/9/2008)

L'abbé Guillaume de Taouärn, membre de l'Institut du Bon Pasteur, nous propose un chemin pour lire les homélies et discours que le pape a prononcés en France.
C'est le moment de le faire à tête reposée - et pas dans l'urgence médiatique comme certains l'ont tenté: hier, sur LCI, Luc Ferry qui se dit philosophe, et qui avait déjà commis quelques perles après le discours de Ratisbonne sur l'apport des musulmans à la culture occidentale a osé affirmer devant Jacques Julliard, sourire narquois aux lèvres, qu'il n'avait rien compris au discours des Bernardins!! Doit-on lui suggérer une reconversion dans une profession où il sera moins exposé à donner son avis sur un sujet dont il ignore tout? Je m'abstiendrai de préciser...

L'abbé, lui, plus perspicace, remarque, et c'est une lecture très originale, que ces discours se déploient selon un ordre extrêmement clair, balayant tous les sujets, depuis l'identité chrétienne de la France (discours à l'Elysée), en passant par la culture comme quête de Dieu (aux Bernardins), puis en ajoutant que cette quête est celle de la vérité qui est le Christ (aux jeunes), ce qui nous interdit les idoles (Invalides) en nous groupant autour du Saint Sacrifice de la messe (idem, deuxième partie), pour nous faire atteindre le Ciel, sa Lumière et le sourire de Marie (Lourdes).

A propos du déjà fameux discours des Bernardins, l'Abbé écrit:
La fidélité à la parole reçue, qu'évoque le pape dans sa Conférence aux Bernardins, n'a rien à voir avec le fondamentalisme, comme il l'a souligné. L'exactitude de la parole transmise ne signifie aucune crispation rétrograde.

Et il conclut:
Ce n'est pas un hasard si le pape a fait remarquer aux évêques cet enthousiasme des jeunes qui l'ont acclamé durant son parcours sur le sol français. La constante verdeur de ce pape de 82 ans est un appel à la jeunesse des coeurs qui se seront laissés renouveler par la foi.



Rappelons que l'intégralité des discours est disponible sur le site du Vatican, il faut les imprimer, et les lire tranquillement.
http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/travels/2008/index_francia_fr.htm



Une visite en crescendo

Abbé de Taouärn: http://ab2t.blogspot.com/2008/09/une-visite-en-crescendo.html
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Après quelques jours, la bulle médiatique est retombée. Quelques méchancetés encore sont lancées à retardement sur la visite du pape de la paix, dans Marianne par exemple, de fausses flèches de Parthe qui n'atteignent d'ailleurs que ceux qui les lancent.


Ce qui est admirable dans l'ensemble, dans le corpus doctrinal que composent les différents discours, c'est que lorsqu'on les relit, indépendamment des circonstances qui les ont fait naître, ils s'avèrent encore plus riches et toujours plus profonds.
Mon ami et néanmoins confrère, l'abbé René Sébastien Fournié, me faisait remarquer tout à l'heure que ces discours se déploient selon un ordre extrêmement clair, balayant tous les sujets, depuis l'identité chrétienne de la France (discours à l'Elysée), en passant par la culture comme quête de Dieu (aux Bernardins), puis en ajoutant que cette quête est celle de la vérité qui est le Christ (aux jeunes), ce qui nous interdit les idoles (Invalides) en nous groupant autour du Saint Sacrifice de la messe (idem, deuxième partie), pour nous faire atteindre le Ciel, sa Lumière et le sourire de Marie (Lourdes).
Et puis, lorsqu'on a contemplé le Ciel, comme le philosophe platonicien, il faut redescendre dans la Caverne, en l'occurrence dans l'Eglise. Il faut régler les problèmes qui s'y posent, non pas selon le caprice de l'instant ou selon l'opinion dominante, mais selon ce que l'on a contemplé.
Il n'y a pas opposition entre le pape de l'intériorité qui est apparu partout et le pape de l'ordre et de la foi qui s'est adressé aux évêques. Contempler ne suffit pas, il faut transmettre aux autres ce que l'on a contemplé. Il faut les inviter à vivre selon la vérité...
C'est parce que Benoît est un vrai contemplatif qu'il est en même temps foncièrement actif et efficace. L'évangile de l'Exaltation de la Sainte Croix que nous avons lu dimanche dernier me semble indiquer cet itinéraire, qui va de la contemplation à l'action : "Marchez dans la Lumière tant que vous avez la Lumière, croyez en la lumière afin de devenir des enfants de Lumière". Croyez afin de devenir !
Telle est la foi, cette connaissance voilée de Dieu en lui-même, du Dieu qui parle, du Dieu qui se révèle, qui transforme celui qui connaît en le faisant devenir d'une certaine manière ce qu'il connaît. Il me semble que l'assurance tranquille du petit homme en blanc vient de la confiance qu'il a dans la faculté transformatrice de la foi.
"Tout avait bien commencé" écrit Témoignage chrétien à propos de ce séjour papal en France. Et d'expliquer que la mise au point faite aux évêques a représenté une lamentable chute dans le conservatisme. Et de laisser les lecteurs conclure que tout a donc très mal fini.
Mais c'est tout le contraire qui est vrai : la leçon aux évêques (comme dit le Figaro) est bien l'akmé de ce voyage en crescendo. C'est le moment où le pape est le plus pasteur, où il est pasteur des pasteurs, serviteur des serviteurs de Dieu. C'est le moment où il transmet avec assurance la puissance transformatrice de la foi (dans sa dernière encyclique, il a donné à cette puissance transformatrice son vrai nom : c'est l'espérance théologale). Ceux qui manquent à l'espérance, en pensant que le pape aurait dû imaginer des solutions en dehors de ce que la foi nous a transmis, ceux qui crient haro sur le conservatisme du pape allemand devraient réfléchir un instant à la puissance transformatrice qui habite un coeur que la foi a saisi.
Rien n'est moins conformiste, rien n'est plus inattendu qu'un chrétien qui s'est laissé saisir par la parole de Dieu. La fidélité à la parole reçue, qu'évoque le pape dans sa Conférence aux Bernardins, n'a rien à voir avec le fondamentalisme, comme il l'a souligné. L'exactitude de la parole transmise ne signifie aucune crispation rétrograde. Elle est au contraire la condition de possibilité d'une transformation radicale : "Créez en moi Seigneur un coeur pur et innovez dans mes viscères un esprit droit" (Psaume 50). La fidélité et l'exactitude des hommes permet à Dieu de parler à travers eux et de s'exprimer en eux, d'exprimer en eux une puissance inconnue sur notre terre, puissance de changement, d'innovation et même, disons-le, d'originalité personnelle. C'est ce que nous disons lorsqu'avant de célébrer la sainte Messe nous récitons le Psaume Judica me, en appelant sur nous, prêtres et fidèles, le Dieu qui réjouit la jeunesse, en confiant aux humains poussifs, lassés, précocement vieillis, la puissance transformante de son sacrifice propitiatoire.
Ce n'est pas un hasard si le pape a fait remarquer aux évêques cet enthousiasme des jeunes qui l'ont acclamé durant son parcours sur le sol français. La constante verdeur de ce pape de 82 ans est un appel à la jeunesse des coeurs qui se seront laissés renouveler par la foi.