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CATHOLIQUES: QUE DU BONHEUR!
 
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Nous avons déjà parlé dans ces pages de ce livre qui porte la signature du courageux et sympathique archevêque de Namur, Mgr Léonard: Encore Mgr Léonard

Le livre est aujourd'hui disponible en France.
Il s'agit d'un recueil de réflexions politiques et sociologiques (de l'évêque) et de méditations poétiques et spirituelles (du philosophe catholique Henri Haas, j'aime un tout petit peu moins...).
Les sujets abordés sont variés, et peuvent se lire dans l'ordre qu'on souhaite; pour avoir une idée, la seconde partie du livre étudie les rapports des catholiques successivement avec les medias, la politique, l'écologie, l'argent, l'école, le sexe, l'art.... Toutes les contributions de Mgr Léonard, écrites d'une plume très plaisante, sont remplies de bon sens et d'humanité. D'un humour décapant, aussi, voilà un homme d'Eglise qui ne se laisse pas tondre, et surtout qui n'est pas dupe.

J'ai choisi de reproduire un extrait de la préface, puis du chapitre relatif aux medias, particulièrement drôle et bien vu -- car ce sujet est inépuisable, et largement développé ici. On jugera que Mgr Léonard ne se contente pas de parler, il agit, car descendre dans la fosse au lion, comme il dit, c'est précisément ce qu'il avait fait en acceptant de répondre aux questions d'un histrion médiatique ( Mgr Léonard attaqué par les medias ), et contrairement à ce que j'avais cru alors, il n'avait nullement été piégé, bien au contraire, c'est lui qui avait fort habilement manipulé son interlocuteur malveillant mais bêtement prévisible.


Le Pape

Ayant eu le bonheur d'assister à l'intronisation de Benoît XVI, puis aux journées Mondiales de la jeunesse à Cologne, je puis attester que les foules italiennes, puis les foules cosmopolites des jeunes, l'ont rapidement adopté comme un authentique père, écouté avec respect, un père plein de délicate et discrète tendresse dont elles apprécient - et elles le lui montrent - la douceur souriante et la clarté professorale.
Nous avons la chance d'avoir depuis longtemps des papes qui portent bien leur nom de Père. Ne boudons pas notre bonheur ! C'est une joie exceptionnelle sur le globe terrestre ! Personne ne doit nous la ravir.



Catholiques et medias

Je ne vais pas jouer à l'autruche. Les médias nous compliquent parfois la vie, à nous catholiques. La plupart ne ratent aucune occasion de présenter l'Église catholique de manière malveillante, voire franchement caricaturale. Beaucoup se permettent avec le pape ou des évêques ce qu'ils ne s'autoriseraient jamais concernant des autorités religieuses juives ou musulmanes, sans parler des responsables des autres confessions chrétiennes ou, a fortiori, des leaders bouddhistes, objet les uns et les autres de préjugés bienveillants.

Une parole qui fait autorité
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Mais cette sourde agressivité anti-catholique est elle-même un hommage implicite à l'Église de Rome. Si elle était aussi minoritaire qu'on le dit dans nos pays, elle s'attirerait moins de sarcasmes. Elle bénéficierait même peut-être de cet a priori favorable qui auréole volontiers les minorités. Les attaques, ouvertes ou insidieuses, sont implicitement une reconnaissance de l'importance morale de l'Église catholique dans notre société. On ne critique de manière aussi virulente que ce qui semble avoir du poids dans la société.

En second lieu, les critiques acerbes sont le plus souvent motivées par les positions très fermes que la hiérarchie catholique défend avec persévérance et cohérence en beaucoup de matières éthiques dont les enjeux sont considérables pour l'avenir de l'humanité. À l'exception de quelques domaines où les théologiens orthodoxes et... musulmans partagent une fermeté comparable, l'Église catholique est à peu près la seule à tenir bon avec rigueur et intelligence en ces matières controversées. À peu près tous les autres ont lâché sur la plupart des points, à des degrés divers. J'ai la candeur de penser que cette fermeté catholique, qualifiée souvent d'intransigeance, fait malgré tout réfléchir les médias. L'Église n'aurait-elle peut-être pas finalement raison ? Et lorsque les journalistes mendient une approbation du magistère catholique sur telle ou telle question éthique, leur ardent désir d'une bénédiction ne trahit-il pas leur perplexité inavouée concernant la pertinence de leur point de vue ?
À force de ratifier les pseudo-évidences du sens commun, à force de calquer leurs valeurs morales sur les résultats des sondages, les responsables de l'information sécrètent au tréfonds de leur conscience une gêne qui s'exprime dans le désir d'être approuvé par l'Église. Ce serait quand même une belle caution... Oui, nos nouveauxmaîtres à penser » (c'est écrit dans le journal, on l'a dit à la télévision, donc c'est vrai!) ont eux aussi leurs états d'âme qui sont autant de courbettes inconscientes en direction de la foi catholique.
Pour ma part, je n'ai qu'à me féliciter du soutien apporté par les médias à mon ministère épiscopal. Et je subodore qu'il doit en aller de même pour pas mal de mes confrères. La meilleure chose qui puisse nous arriver est de décider en conscience, au début de notre épiscopat, des mesures pastoralement indispensables, mais qui prendront à rebrousse-poil une partie importante de l'opinion. Aussitôt, sans réfléchir aux enjeux de fond et aux problématiques à long terme, les journaux sonnent la curée. Haro généralisé sur l'Église obscurantiste, sur l'évêque imposé par Rome, sur le pape rétrograde! J'en passe, et des meilleures.
Moralité : on cherche à interviewer le pelé, le galeux, dans l'espoir de mieux pouvoir l'enfoncer. Par là même on lui fait, gratuitement, une énorme publicité. Et quand il est traîné devant le Sanhédrin des conférences de presse, l'occasion lui est ainsi offerte d'exprimer son point de vue avec nuances. Il finit par en passer quelque chose dans les comptes rendus d'audience. Partout où déambule désormais le " très controversé évêque de machinchouette "(c'est leur manière stéréotypée de parler... ), beaucoup s'intéressent à ses propos comme ils ne l'eussent jamais fait antérieurement, sans cette bienheureuse complicité involontaire de la presse.

À partir de là se présentent grosso modo trois cas de figure.
- Ou bien les médias finissent par nuancer euxmêmes leurs condamnations sommaires du début. Cette pirouette est alors du pur pain bénit pour ceux qui furent initialement cloués au pilori. Le rétablissement médiatique redore avec bonheur les blasons papaux ou épiscopaux qui avaient été antérieurement taggués avec soin.
- Deuxième hypothèse : on ne parle plus des intéressés dans la presse. C'est le silence-radio-journal-télévision. Du coup, le bon peuple, d'abord ébranlé, en conclut non sans raison que les choses ont dû s'arranger, que l'objet du litige est éteint et qu'on avait dû se tromper de cible. Ce n'est à nouveau que du bonheur, car, chacun le sait, les gens heureux n'ont pas d'histoire, ce qui permet à la rigueur de conclure (en mauvaise logique, je le reconnais!) que les gens sans histoire sont heureux.
- Troisième possibilité : en lisant notamment des textes comme celui que vous lisez maintenant, les médias prennent à nouveau des airs de vierge outragée, crient au machiavélisme populiste, au cynisme clérical, et relancent leurs attaques, avec, il est vrai, un peu moins de crédibilité qu'au début. Mais ce faisant, ils relancent le cercle vertueux que je viens de décrire et nous ramènent, comme c'est le cas avec tout honnête cercle, à la case de départ. Pris à leur propre piège, ils ne peuvent plus travailler que pour nous quand ce n'est pas avec nous. Merci, les médias ! Sans vous, que serions-nous? Rien que l'essentiel...

Un excellent attelage
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Puisque les médias rendent de si grands services à l'Église catholique, ne les boudons pas. Dès lors que nous sommes, en tant que chrétiens, des fils de lumière, mettons à les utiliser autant d'ingéniosité que les fils des ténèbres en investissent à tromper leur monde. ... Acceptons donc les invitations à participer à des débats, sauf peut-être lorsque la laïque libre-penseuse » de service, appelée à prendre systématiquement le contre-pied de tout, n'est, de toute évidence, ni libre ni penseuse... Ou bien lorsque le "catholique de gauche" invité à vous servir de contrepoids et à donner l'image d'une Église divisée est tellement de gauche que l'étiquette « catholique », aussi adroite (!) soit-elle, sort manifestement du périmètre chrétien et recouvre tout et son contraire. Difficile alors de débattre avec un caméléon ou une liane protéiforme!
Pour le reste, allons-y ! N'oublions pas la parole de Jésus : « Ne vous préoccupez pas de ce que vous direz, mais dites ce qui vous sera donné sur le moment, car ce n'est pas vous qui parlerez, mais l'Esprit Saint » (Mc 13, 11). Il ne faut préparer que si le débat a un contenu, ce qui n'est pas fréquent. S'il est plutôt de l'ordre de la joute oratoire ou du punching-ball, la consigne de jésus est d'application stricte.
N'ayons surtout pas peur d'être "piégés", comme on dit. C'est l'argument employé régulièrement par ceux qui, secrètement, préfèrent rester tranquillement chez eux plutôt que de se taper des kilomètres pour aller se faire maquiller et poireauter dans les antichambres des studios en attendant de descendre dans la fosse aux lions. Mais s'abstenir de la discussion publique, aussi indigente puisse-t-elle être parfois (mais pas toujours!), est un piège encore plus dangereux que de se risquer à mains nues dans les arènes du débat démocratique, avec ses quelques défauts et ses immenses qualités. Car le débat démocratique a, certes, l'inconvénient de suggérer que la vérité est simplement le fruit d'un consensus et ne repose sur aucun fondement métaphysique ; mais il a l'immense avantage, dans le domaine politique, de permettre au plus grand nombre de réfléchir sans réserver ce privilège à quelques décideurs patentés. Et puis, si les fils de lumière jouent trop aux dégoûtés face aux ambiguïtés des interviews médiatiques, il n'y aura bientôt plus que les dégoûtants à prendre la parole. Quand celle-ci nous est offerte ou lorsque nous pouvons la saisir, prenons-la. C'est toujours ça que les fils des ténèbres n'auront pas !
Bref, « catholiques et médias » un excellent attelage !


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