Réponse à travers le remarquable dossier rassemblé par le bulletin VIS (14/5/2009)



Le Pape est pour les Palestiniens
C'est ce que la presse répète à l'envi depuis hier...
Je m'avance avec précautions sur la partie politique inévitable de son voyage. J'ai déjà dit que je ne croyais pas connaître suffisamment la situation au Moyen Orient, et je sais que, même vu d'ici, le terrain est piégé.
Il est permis cependant de remarquer qu'avant le voyage, l'ensemble des medias (mais pas seulement) avait mis Benoît XVI en garde - sur un ton comminatoire - contre toute prise de position trop voyante en faveur de l'une des parties en présence.



C'était implicitement les mettre toutes les deux sur des plans symétriques.
Les premiers commentaires commencent déjà à dire: il n'a pas pu éviter tous les écueils. Ah bon?

Or, les images que nous avons vues là-bas - et la visite du Saint-Père a forcément attiré l'attention du monde entier dessus - nous disent que ce n'est pas tout à fait le cas. Ce qui est pour le moins une litote, d'ailleurs. La vue des barbelés surmontant le mur autour du camp d'Aïda était à cet égard particulièrement significative.
Je n'en dirai pas plus.



Sur l'aspect politique du voyage, qui était l'essentiel de son périple du 13 mai en Cisjordanie.
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Le bulletin d'information du Vatican (VIS) a fait un beau travail, en publiant très rapidement les synthèses quotidiennes.
Plutôt que de reprendre un par un les discours et homélies, ce qu'on pourra faire après, servons-nous donc de leur beau travail, qui m'inspire plus de confiance que celui des agences de presse.
Il y a en particulier un petit dossier explicatif très bien fait (pour les "nuls" comme moi!) sur la situation politique actuelle entre Israël et les Territoires autonomes palestiniens.
Extraits des bulletins des 13 et 14 mai:



UNE PATRIE POUR LES PALESTINIENS
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A 8 h 45' locale, Benoît XVI a quitté la Délégation apostolique de Jérusalem pour se rendre, à 10 km de là, au Palais présidentiel de l'Autorité palestinienne à Bethléem.
Sur son trajet, il a traversé la frontière entre Israël et les Territoires autonomes palestiniens par la Porte de la tombe de Rachel.

(Dossier explicatif)
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Les Territoires autonomes palestiniens sont composés de deux entités géographiques séparées par 30 km de territoire israélien: la Cisjordanie, contiguë avec Israël et la Jordanie, et la Bande de Gaza, limitrophe avec Israël et l'Egypte. Cette entité est reconnue par les Nations-Unies, et par les Accords d'Oslo conclus en 1993 entre Israël et l'Organisation pour la libération de la Palestine. Les territoires sont gouvernés par l'Autorité palestinienne dont le siège est à Ramallah, en Cisjordanie et son Président est M.Mahmoud Abbas. Sur la base des Accords d'Oslo, Bethléem fait partie depuis 1995 des Territoires autonomes palestiniens. Le Palais présidentiel, où le Pape a été accueilli, a été construit par Yasser Arafat, Président de l'OLP et premier Président de l'Autorité nationale palestinienne.
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Benoît XVI a été accueilli par l'actuel Président, M.Mahmoud Abbas, après quoi il a prononcé un discours:

"Mon pèlerinage sur les terres de la Bible ne pouvait pas être complet sans une visite à Bethléem, la Cité de David et le lieu de naissance de Jésus Christ. Je ne pouvais pas non plus venir en Terre Sainte sans accepter la courtoise invitation du Président Abbas de visiter ces Territoires et saluer le peuple palestinien.
Je sais combien vous avez souffert et continuez de souffrir à cause des troubles qui affligent cette terre depuis des décennies. Mon cœur s'émeut pour toutes les familles qui n'ont plus de maison pour s'abriter... A ceux d'entre vous qui sont dans le deuil pour la perte de membres de leur famille et d'êtres chers à cause des hostilités et je pense en particulier au récent conflit à Gaza, j'offre l'assurance de ma profonde compassion et de mon souvenir dans la prière. Oui, je vous garde chaque jour dans ma prière, et je supplie instamment le Tout Puissant pour la paix, pour une paix juste et durable, dans les Territoires palestiniens et dans toute la région".

Le Saint-Père a ensuite dit au Président Abbas:
"Le Saint-Siège soutient le droit de votre peuple à une patrie palestinienne souveraine sur la terre de ses ancêtres, sûre et en paix avec ses voisins, à l'intérieur de frontières reconnues au niveau international. Mais si, à l'heure actuelle, cet objectif semble loin d'être atteint, je vous encourage fortement, vous et votre peuple, à garder vivante la flamme de l'espérance, l'espérance qu'un moyen pourra être trouvé pour satisfaire les légitimes aspirations, tant des Israéliens que des Palestiniens, à la paix et à la stabilité.".
Rappelant les paroles de Jean-Paul II "pas de paix sans justice, pas de justice sans pardon", il s'est ensuite exclamé:
"Je veux plaider auprès des parties concernées par ce conflit prolongé, leur demandant d'oublier tout grief et toutes divisions qui demeurent encore sur le chemin de la réconciliation, et de tendre la main avec générosité et compassion vers leurs semblables, sans aucune discrimination. Une juste et paisible coexistence des peuples du proche et moyen orient ne peut être réalisée que dans un esprit de coopération et de respect mutuel, faisant en sorte que les droits et la dignité de tous soient reconnus et promus.
Je vous demande -a-t-il ajouté- à vous tous, je demande à vos dirigeants, de prendre à nouveau l'engagement d'œuvrer pour atteindre ces buts. Et j'en appelle en particulier à la communauté internationale en lui demandant d'apporter le poids de son influence pour arriver à une solution".

"Je souhaite ardemment que les sérieuses inquiétudes concernant la sécurité en Israël et dans les Territoires Palestiniens seront bientôt suffisamment apaisées pour permettre une plus grande liberté de mouvement, surtout en ce qui concerne les contacts entre les membres d'une même famille et l'accès aux lieux saints.
Les Palestiniens, comme tout autre peuple, ont aussi le droit naturel d'avoir une maison, de fonder une famille et d'accéder au travail, à l'éducation et à l'assistance sanitaire...
Je prie aussi -a encore ajouté le Pape- pour que, avec l'aide de la communauté internationale, les travaux de reconstruction puissent avancer d'un bon pas là où des maisons, des écoles ou des hôpitaux ont été endommagés ou détruits par les combats, afin que tous les habitants de cette terre puissent vivre dans des conditions qui favorisent une paix durable et la prospérité. Des infrastructures stables offriront à vos jeunes de meilleures possibilités pour acquérir des compétences professionnelles et trouver un travail rémunérateur, leur permettant ainsi d'apporter leur contribution à la construction de la vie de vos communautés".

Il a ensuite lancé un appel aux jeunes: "Ne permettez pas que les pertes en vies humaines et les destructions dont vous avez été les témoins nourrissent en vos cœurs l'amertume ou le ressentiment. Ayez le courage de résister à toutes les tentations que vous pourriez ressentir de vous livrer à des actes de violence ou de terrorisme. Au contraire, permettez que ce que vous avez expérimenté renouvelle votre détermination à construire la paix. Que cela vous remplisse d'un profond désir d'apporter une contribution durable à l'avenir de la Palestine, afin qu'elle puisse prendre sa juste place sur la scène du monde. Que cela inspire vos sentiments de compassion envers ceux qui souffrent, votre zèle pour la réconciliation et votre ferme conviction qu'un avenir plus brillant est possible".



ETEINDRE CE QUI DRESSE DES MURS
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Après sa visite à l'hôpital pédiatrique de Bethléem, le Pape s'est rendu en papamobile au Camp de réfugiés d'Aïda, à 2 km de distance.

(Dossier explicatif)
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C'est un des camps accueillant les 1.300.000 réfugiés palestiniens causés par la guerre d'indépendance d'Israël en 1948 et par la guerre israélo-arabe de 1967. Fort de 5.000 personnes, il est un exemple de coexistence entre musulmans et chrétiens. Dans les Territoires palestiniens de Cisjordanie et de Gaza vivraient entre 3 et 4 millions de personnes. En outre, selon les Nations-Unies, les réfugiés palestiniens étaient l'an dernier 1.700.000 en Jordanie, 409.000 au Liban et 120.000 en Syrie.
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Ma visite de ce camp, a dit Benoît XVI, "m'offre l'occasion d'exprimer ma solidarité à tous les palestiniens qui n'ont pas de maison et qui attendent de pouvoir retourner sur leur terre natale, ou d'habiter de façon durable dans une patrie qui leur soit propre".
Puis il a salué l'action de l'Office de secours et de travaux des Nations-Unies pour les Réfugiés de Palestine et exprimé sa reconnaissance à la multitude d'hommes et de femmes venus du monde entier et qui offrent leur aide, ici et dans les autres camps de la région".
Soulignant la grande importance de l'éducation, il a encouragé les familles à soutenir leurs enfants dans leurs études et dans la cultivation de leurs talents, "de sorte qu'à l'avenir ne manque pas le personnel qualifié pour occuper les fonctions dirigeantes dans la Communauté palestinienne... Je sais que beaucoup de vos familles sont divisées, à cause d'emprisonnement de membres ou de la limitation de la liberté de déplacement, et que beaucoup d'entre vous ont connu le deuil. Mon cœur va vers tous ceux qui ont ainsi souffert. Soyez assurés que tous les réfugiés palestiniens à travers le monde, spécialement ceux qui ont perdu leurs maisons et des êtres chers durant le récent conflit à Gaza, sont présents dans mes prières".
Puis il salué le beau travail réalisé par nombres d'organismes de l'Eglise en faveur des réfugiés ici et dans les autres parties des Territoires palestiniens, telle la Mission pontificale pour la Palestine ou les franciscaines missionnaires du Cœur immaculée de Marie, qui "nous invite à faire mémoire de la figure charismatique de François, ce grand apôtre de la paix et de la réconciliation... Je dit aussi toute ma reconnaissance pour la contribution exceptionnelle que les différents membres de la famille franciscaine apportent aux populations de cette région, se faisant des instruments de paix...
Combien les gens de ce camp, de ces territoires, et de la région tout entière attendent la paix! En ces jours, ce long désir prend un relief particulier quand vous vous souvenez des événements de mai 1948 et du conflit non résolu qui s'en suit depuis. L'exode massif de la population arabe locale débuta le 15 mai 1948 dès le retrait de la Grande-Bretagne, fixé par la résolution 181 des Nations-Unies de novembre 1947.
"Vous vivez depuis dans des conditions précaires et difficiles, avec des possibilités limitées de trouver un emploi. Il est compréhensible que vous vous sentiez souvent frustrés. Vos aspirations légitimes à un logement stable, à un Etat palestinien indépendant, demeurent non satisfaites. Au contraire, vous vous trouvez piégés, comme beaucoup d'autres en cette région et à travers le monde sont piégés, dans une spirale de violence, d'attaque et de contre-attaque, de vengeance et de destruction continuelle. Le monde entier espère que cette spirale soit brisée afin que la paix mette fin à ces hostilités continuelles. Ici, en voyant ce mur, nous ressentons le point mort auquel semblent être arrivés israéliens et palestiniens".

"Dans un monde où les frontières sont de plus en plus ouvertes, pour le commerce, pour les voyages, pour le déplacement des personnes, pour les échanges culturels, il est tragique de voir des murs continuer à être construits.
Comme il nous tarde de voir les fruits d'une tâche bien plus difficile, celle de construire la paix!
Prions constamment pour la fin des hostilités qui sont à l'origine de ce mur!
De part et d'autres du mur, un grand courage est nécessaire pour dépasser la peur et la défiance, pour résister au désir de se venger des pertes ou des torts subis. Il faut de la magnanimité pour rechercher la réconciliation après des années d'affrontement.
Pourtant l'histoire a montré que la paix ne peut advenir que lorsque les parties en conflit sont désireuses d'aller au-delà de leurs griefs et de travailler ensemble pour des buts communs, prenant chacune au sérieux les inquiétudes et les peurs de l'autre et s'efforçant de créer une atmosphère de confiance. Il faut de la bonne volonté pour prendre des initiatives imaginatives et audacieuses en vue de la réconciliation. Si chaque partie insiste en priorité sur les concessions que doit faire l'autre, le résultat ne peut être qu'une impasse".
"L'aide humanitaire, telle celle qui est fournie à ce camp, a un rôle essentiel à jouer, mais la solution à long terme à un conflit tel que celui-ci ne peut être que politique. Personne n'attend que les Palestiniens et les Israéliens y parviennent seuls. Le soutien de la communauté internationale est vital, et c'est pourquoi, je lance un nouvel appel à toutes les parties concernées pour jouer de leur influence en faveur d'une solution juste et durable, respectant les requêtes légitimes de toutes les parties et reconnaissant leur droit de vivre dans la paix et la dignité, en accord avec la loi internationale.
En même temps, toutefois, les efforts diplomatiques ne pourront aboutir heureusement que si les palestiniens et les israéliens ont la volonté de rompre avec le cycle des agressions".
Benoît XVI a conclu en renouvelant son appel à un engagement profond des chrétiens à "cultiver la paix et la non-violence, suivant l'exemple de saint François et des autres grands artisans de paix. La paix doit commencer à la maison, dans la famille, dans le cœur. Je continue de prier pour que toutes les parties du conflit qui se déroule sur ces terres aient le courage et l'imagination nécessaires pour emprunter le difficile mais indispensable chemin de la réconciliation. Puisse la paix fleurir à nouveau sur cette région Puisse Dieu bénir son peuple en lui offrant la paix!".
Après cette visite, il a gagné en voiture la résidence présidentielle de Bethléem pour s'entretenir avec le Président Abbas et l'Autorité nationale palestinienne.



PAIX, LIBERTE ET STABILITE
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A 18 h à Bethléem, le Saint Père a été reçu par le Président de l'Autorité palestinienne, M.Mahmoud Abbas, et a rencontré un groupe d'habitants de Gaza et de Cisjordanie.
Après avoir remercié ses hôtes pour la "grande délicatesse" dont il a été entouré, Benoît XVI a ajouté que la journée passée dans les Territoires palestiniens avait vraiment été mémorable.
Evoquant le mur construit sur leurs terres, il a dit: "Si les murs peuvent être facilement construits, nous savons qu'ils ne sont pas éternels. Ils peuvent être abattus. Mais avant de les abattre, il est nécessaire d'ôter les murs construits autour de nos cœurs, les barrières érigées contre nos voisins... C'est pourquoi, je désire lancer à nouveau un appel à l'ouverture et à la générosité d'esprit, en vue de mettre fin à l'intolérance et à l'exclusion... Il y a toujours des raisons d'espérer qu'il puisse être résolu, et que les efforts patients et persévérants de ceux qui travaillent pour la paix et la réconciliation, porteront des fruits en fin de compte. Mon souhait sincère pour vous, peuple de Palestine, est que cela arrivera bientôt pour vous permettre de jouir de la paix, de la liberté et de la stabilité dont vous avez été privés depuis si longtemps".
Benoît XVI a enfin assuré ses hôtes qu'il profiterait de toutes les opportunités pour "encourager ceux qui sont engagés dans les négociations de paix à travailler ensemble pour une solution juste qui respecte les aspirations légitimes des deux parties.
Pas important dans cette direction, le Saint-Siège cherche à établir rapidement, conjointement avec l'Autorité palestinienne, la Commission bilatérale permanente de travail qui fut envisagée par l'Accord de base, signé le 15 février 2000".





Curiosité Un nouveau chapitre de gaffes?