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CHRONIQUE D'UN MOTU PROPRIO ATTENDU

Une crise franco-française

Cela fait maintenant plus d'un an (en fait, cela avait même commencé avant Noël 2005) que l'on annonce comme incessante la publication d'un motu proprio du Saint-Père, libéralisant la célébration de la messe selon le rite tridentin. On sentait bien alors que les prières de plus en plus pressantes des "traditionalistes" ressemblaient aussi de plus en plus à des injonctions, puis des menaces.
De tous côtés, donc, des pressions ont semblé s'exercer sur lui, certaines ayant pris la forme de fuites savamment distillées depuis le Vatican même, sans doute dans le but de "tester" les réactions. Quelle que soit l'idée qu'on se fait du gouvernement de l'Eglise, il est clair premièrement que Benoît XVI ne peut pas décider tout seul, et deuxièmement que sa décision engagera tout l'avenir, et ses successeurs, il doit donc prendre son temps. Il en a d'ailleurs l'habitude, l'Abbé Claude Barthe nous ayant dit qu'il s'agissait quasiment pour lui d'une méthode de travail: L'Abbé Barthe sur le FC .
Sans parler du fait qu'il n'est probablement pas homme à céder à des pressions, prennent-elles l'apparence du chantage, comme cela a été le cas récemment (cf Le monde d'Henri Tincq : Le décret ("motu proprio") du pape a été retardé sur la pression des évêques français, mais après les crises polonaise, espagnole, italienne, on voit mal Benoît XVI prendre le risque de se mettre à dos l'Hexagone).

Il semble en fait qu'une fois de plus, dans la "grande" tradition gallicane qui a déjà fourni à la révolution française ses "prêtres jureurs", nous soyions devant un scenario franco-français (hélas!)
A ce propos, je n'ai lu aucune analyse plus pertinente sur la question que celles figurant sur le site de l'Association Pro Liturgia , à découvrir sur leur page <Information> des mois de Janvier et Février 2007. La responsabilité de l'épiscopat français y est clairement mise en cause pour avoir vidé les églises en sabotant la liturgie, détourné l'enseignement de Vatican II, et refusé d'obéir au Pape. Le constat est sévère, mais les résultats sont là...
Un des articles du site a déjà été cité dans ces pages: Benoît XVI, motu proprio, liturgie, réforme
Lire aussi sur ce sujet:
- Pas de calcul pour le Pape
- Soutenons-le
- Projet d'autoriser la messe de Saint-Pie V
- Pétition dans le Figaro
- Et, sur les réactions des journaux catholiques, il ne faut pas manquer cela: "Stop!!"

Voici quelques autres articles vus sur pro Liturgia; leur auteur explique le retard dans la publication du motu proprio par l'intention du Saint-Père de produire un texte d'une plus vaste portée.
Car il est évident que le problème ne se limite pas à une autorisation donnée pour célébrer la messe "en latin" -ou même, en étant plus technique, selon "le rite de Saint-Pie V": nous ne jouerons pas sur les mots! Les réactions passionnées et excessives lue sur les forum fréquentés par les traditionalistes d'une part, et dans la presse catholique d'autre part -forcément progressiste- prouvent que les "tensions" sont réelles, et la rancoeur immense. Les faits sont têtus, et la catastrophe n'est pas une invention! L'un des problèmes les plus graves, et qui ne peut trouver une solution que dans le long terme, est le problème de la formation des prêtres. Ce problème-là est dramatique, il s'inscrit dans le prolongement de la crise du système éducatif (je suis professeur...) au sens le plus large, et si l'on est pessimiste, on peut penser que la partie est peut-être déjà perdue. En tous cas, nous savons que le Saint-Père y est très sensible, et en parle souvent, et encore tout récemment: Adresse aux séminaristes du collège Capranica


Sur "Proliturgia"

http://perso.orange.fr/proliturgia/Informations.htm
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UNE GRANDE LEÇON DE SAGESSE

"(...) J'ai toujours voulu rester fidèle au concile Vatican II, cet aujourd'hui de l'Eglise, sans nostalgie pour un hier irrémédiablement passé, sans impatience pour un demain qui ne nous appartient pas." Cardinal J. Ratzinger, Entretien sur la foi, éd. Fayard, 1997, p.17.
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THE BIG FRENCH BAZAR


Dans une paroisse, des fidèles s'adressent à leur curé pour lui demander de célébrer une messe strictement conforme au missel romain actuel. Le curé refuse. Les fidèles s'adressent alors à l'évêque, qui leur répond que vouloir une messe célébrée strictement selon le missel constituerait, par rapport à ce qui se fait habituellement dans les paroisses, une exception difficile à gérer par la suite.
....
[Ceci] illustre bien la situation dans laquelle sont obligés de nager -sans couler à pic - les fidèles: s'ils veulent suivre ce que dit le Saint-Père, il doivent éviter d'écouter ce que disent les évêques; s'ils se décident à suivre les évêques, ils ont le sentiment de ne plus être en phase avec l'enseignement du pape.
Le problème est simple: depuis plus de 40 ans, entre le Saint-Siège et les fidèles de la base, les courroies de transmission sont défaillantes... notre épiscopat se contente de transmettre ce qui le met à l'abri des turbulences, ce qui lui évite de s'engager véritablement. "Courage... fuyons!" telle pourrait être une devise commune à tout une génération de pasteurs.
[...]
Que peuvent encore attendre les fidèles catholiques de France de leurs évêques?
Réponse: rien, rien, rien, plus rien, semble-t-il. Et c'est désespérant.
...
Quand des "traditionalistes" s'adressent à eux pour demander la possibilité d'avoir la liturgie d'avant le Concile, ils font la sourde oreille: mieux vaut pas de messe du tout qu'une messe célébrée selon l'ancien missel.
Quand des fidèles attachés à l'application de Vatican II leur demandent la liturgie définie par le missel romain actuel, ils jurent que la liturgie conciliaire est célébrée partout dans les églises. Quand Benoît XVI parle de publier un motu proprio pour tâcher de mettre un terme à la souffrance de certains fidèles, aussitôt un vieux réflexe gallican les pousse à aller faire la leçon au Souverain Pontife.
Non, les fidèles de France n'ont - sauf preuve du contraire - plus rien à attendre d'un épiscopat composés d'hommes dont la pensée à été formatée dans des séminaires gagnés aux idées soixante-huitardes, et dont les seules occupations, aujourd'hui, semblent l'organisation de réunions qui accouchent de souris, la nomination de responsables chargés de maintenir artificiellement en vie des institutions vétustes, la publication de déclarations qui ne débouchent sur rien de concret.

Dans de telles conditions, les fidèles sont de plus en plus nombreux à penser que pour servir l'Eglise, il faut désormais s'en tenir aux enseignements du pape et se passer des avis ou des autorisations épiscopales.
...


Le temps n'est-il pas venu de réagir, de faire savoir haut et fort au Saint-Père que nous lui faisons une confiance que nous ne sommes malheureusement plus disposés à accorder à nos pasteurs diocésains, dans la mesure où nous avons depuis trop longtemps l'impression de n'avoir reçu d'eux que des pierres quand nous leur demandions du pain?
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ET SI...

A la fin de l'année dernière, l'Exhortation post-synodale sur l'Eucharistie était prêtre et sa publication, disait-on, ne devait plus tarder.
Puis il y a eu "l'affaire du Motu proprio" devant libéraliser l'ancienne façon de célébrer la liturgie romaine et qui a provoqué l'emportement d'une bonne partie de l'épiscopat français d'habitude peu prompt à s'engager sur des questions liturgiques.
Puis il y a eu la joie de certains - pas tous! - mouvements traditionalistes à l'annonce du Motu proprio. Puis plus rien... Ni Exhortation synodale, ni Motu Proprio.
Certains ont alors annoncé que la marge de manoeuvre de Benoît XVI était étroite; d'autres ont dit à qui voulait bien l'entendre que Benoît XVI était devenu l'otage d'un épiscopat français qui a ceci de curieux, qu'il admet toutes les formes de liturgies dans les églises, y compris les plus farfelues, sauf celle issue de Vatican II et celle d'avant Vatican II. C'est ignorer le petit monde du Vatican que d'imaginer qu'un pape ne pourrait plus y faire ce qu'il sait être bénéfique pour l'Eglise universelle - et non uniquement pour des chapelles françaises -.
On peut très bien imaginer un autre scénario
: Benoît XVI, après avoir pris avis des spécialistes en liturgie et en pastorale, et après avoir réexaminé le contexte ecclésial français, prend à présent son temps pour parfaire un document qui ira plus loin que l'Exhortation post-synodale et plus loin que que le Motu proprio attendus. Car la crise liturgique actuelle n'est pas réductible à une question de rites à faire ou à ne pas faire, ou de missel à employer ou à ne pas employer. Comme l' a laissé entendre le Cardinal Arinze à Paris, il y a d'abord une question de formation à donner aux prêtres: une formation qui n'était pas donnée, avant le Concile, dans les séminaires diocésains où il n'était question que de reproduire docilement des rites et des belles cérémonies; une formation qui ne fut pas davantage donnée, après le Concile, dans les séminaires devenus interdiocésains où il n'était question que de faire preuve de créativité, d'imagination, d'anarchie... pour effacer de la mémoire des fidèles 2000 ans de tradition liturgique. Ce que Vatican II n'avait jamais demandé de faire, bien au contraire.
Oui, il y a à la base de la crise liturgique une question de formation: il s'agit de redonner aux prêtres conscience de ce qu'ils font lorsqu'ils célèbrent l'Eucharistie; il s'agit de redéfinir ce qu'est la "tradition" en liturgie et pour l'Eglise; il s'agit non pas de critiquer le Concile, mais de le lire, de le comprendre et enfin de l'appliquer à la lumière de la Tradition, ce qui est au fond la seule façon "catholique" de voir les choses.
...
On sait que Benoît XVI est expert pour conduire les évêques, premiers responsables de la liturgie, là où ils doivent aller. La preuve? Il aura suffit d'annoncer un Motu proprio pour qu'une sainte panique s'empare de notre épiscopat français et que celui-ci, soudain, se dise attaché à Vatican II, garant de la liturgie issue du Concile, attentif à ce que la célébration eucharistique soit l'expression de la foi de l'Eglise et non des sentiments des fidèles... etc. Il se pourrait bien que le Saint-Père dise à présent à nos évêques que de telles paroles ne suffisent pas, et qu'il exige d'eux des actions concrètes allant dans le sens de ces belles déclarations.
Benoît XVI pourrait bien nous surprendre, ces jours prochains, en publiant un document d'une grande densité sur le plan théologique et pastoral. Nous lui accordons notre totale confiance!



Le Saint-Père et la Loi Naturelle | Février 2007