Une dernière analyse de Paolo Rodari, "avant" (8/5/2009)



Benoît en Terre Sainte : le défi d'un Pape jamais « politically correct »
8 mai 2009, Il Riformista
http://www.paolorodari.com/...mai-politically-correct/
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Le juste équilibre sans trahir la vérité.
C'est ce que chercheront à être les vingt-huit méditations que Benoît XVI fera à l'occasion du pèlerinage en Terre Sainte - quarante-cinq ans après Paul VI, neuf après Jean Paul II - programmées entre aujourd'hui et vendredi prochain.
Un juste équilibre dont ceux qui ont collaboré avec le Pontife à la rédaction des textes (salutations,homélies et discours), promettent qu'il sera maintenu.
Même si, à y voir de près, l'entreprise n'est pas facile.
Benoît XVI ne se soucie jamais du politiquement correct, comme la majorité de son auditoire attendrait immanquablement qu'il le fasse.
Il ne l'a pas fait à Ratisbonne, au point que la lectio autour de la vérité qui doit sous-tendre toute rencontre entre des croyances différentes a provoqué une furieuse tempête non seulement dans le monde musulman mais aussi dans la plupart de l'intelligentsia occidentale, depuis longtemps étrangère à cette composante de scandale inhérente à la nature de toute pensée catholique sincère.
Il ne l'a pas fait en partant pour l'Afrique, qualifiant le condom de « préservatif » - chose inhabituelle pour un Pontife - et réaffirmant combien une vie sexuelle déréglée (qui est mise en avant et peut-être suscitée par la distribution du condom) n'aide pas la lutte contre le sida.
Il ne l'a pas fait aux Etats Unis en avril de l'an dernier: la lutte contre le terrorisme international - a t'il dit - doit être conduite « de bonne foi, dans le respect de la loi et dans la promotion de la solidarieté vis-à-vis des régions les plus faibles de la planète ». Paroles peu confortables pour l'administration Bush mais qui, accueillies sans prejugés comme les américains, mieux que d'autres, savent le faire, ont provoqué une standing ovation plutôt que des sifflets.
Ratzinger est théologien en plus d'être pape. Gentil et doux. Son argumentation est de haut niveau, une autre démarche dans la frénésie du monde. C'est pourquoi, souvent, il n'est pas compris. Les deux mondes, le sien et celui de ses auditoires, voyagent dans des dimensions différentes, des plans parallèles.
Le risque inhérent, derrière chaque discours est là : l'auditoire sera-il en mesure de comprendre ? Sera-il capable de se détacher du joug de ce que le cardinal archevêque de Bologne Carlo Caffarra a défini récemment comme « le pouvoir de politically correct » et d'entrer par la porte étroite, et même plus, à contre courant, du message chrétien ?
Certes, la vérité que Benoît XVI cherchera à démêler en Terre Sainte tiendra compte de différentes nuances. Elle tiendra compte de la sensibilité en jeu : l'argumentaire d'un équilibriste dans un champ miné. Parce qu'une chose est ne pas trahir la vérité, une autre est d'être naïf.
Il y a beaucoup de « si » et de « mais » que Benoît XVI a dû considérer en développant (aidé par son entourage) les vingt-huit méditations.
Il doit parler, en effet, sans oublier qu'il est sur les lieux saints foulés par le Messie, qu'il se rend avant tout comme un pèlerin, avant tout pour découvrir et redécouvrir le mystère que cachent les endroits décrits dans son premier livre comme Pontife "Jésus de Nazareth".
Il doit parler, en tenant compte de la trêve - succédané d'une vraie paix - en cours; de la sensibilité d'Israël (en janvier dernier pendant l'opération « plomb fondu » Jérusalem, se référant à des déclarations du cardinal Renato Raffaele Martino, lança de lourdes accusations contre le Saint Siège, coupable d'avoir proféré des mots au profit du Hamas « basés sur la propagande » de ce dernier), et des palestiniens (toujours en janvier dernier le Pape expliqua que l' « énorme violence » d'Israël avait été causée par « d'autres violences », les leurs).
Il doit parler, en rappelant les énormes difficultés des chrétiens résidents dans la région. Ces derniers, ceux des territoires palestiniens, sont en migration continue, humiliés par le manque de logements et de travail, tandis que derrière le mur construit par Israël ils luttent pour la liberté d'expression à l'intérieur de leurs lieux de culte.
Il doit parler, en considérant que la Commission bilatérale permanente de travail entre le Saint Siège et l'État d'Israël manque à chaque rendez-vous (le prochain sera en décembre 2009) son but principal : un traité qui devrait reconnaître à l'Église les exemptions historiques de taxes en Terre Sainte, fixer des règles pour la protection des propriétés de l'Église et obtenir le retour de plusieurs lieux sacrés.
Et il doit parler en rappelant qu'outre Israël et les palestiniens, l'Eglise fait partie du monde musulman et juif qu'il rencontrera d'aujourd'hui à vendredi prochain (demain il se rendra à la Basilique du Memorial de Moïse et visitera la mosquée al-Hussein Bin Talal d'Amman. Après quoi il visitera le site du Baptême sur les rives du Jourdain. Donc Israël et les Territoires palestiniens).
Quant à l'islam, le départ du voyage est en pente : la rencontre avec le Roi et la Reine de Jordanie est une garantie de détente. Abd Allah II est un des promoteurs du Message d'Amman qui donna une forte impulsion au monde islamique sur la route du dialogue avec les juifs et les chrétiens.
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