Un voyage à haut risque, c'est ce qu'on lit partout.
Le résumé de L'Express, avec des révélations inédites.
L'humour involontaire d'un journal suisse. (7/5/2009)
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La vigilance s'impose...
Je ne croyais pas si bien dire, hier (Derniers commentaires avant ), en écrivant qu'il allait falloir lire la presse avec de grandes précautions.
J'ignore comment le voyage va se dérouler, mais on a déjà bien compris qu'elle a décidé de mettre la barre très haut (dans le sens où elle l'entend) pour le Pape.
Autrement dit, "voyage à haut risque", pour ne pas dire "mission impossible". "On le verrait bien la corde au cou, et en chemise, comme les bourgeois de Calais.

Je remarque, sur le site du Monde cette information fausse, déjà évoquée hier:
Edition abonnés Archive : Précipitée par l'affaire Williamson, la visite du pape en Israël suscite un trouble

Non! Le timing de la visite n'a rien à voir avec l'affaire Williamson, et il est facile de le prouver.



Dans la masse des articles déjà disponibles sur le réseau, il est essentiellement question du caractère politique du voyage (nous avons déjà dit ce qu'il en était) et des "gaffes" à répétition du Pape, condamné par ses maladresses à s'excuser auprès des juifs.
Sur ce dernier point, voir ci-contre une capture d'écran, sur le site de L'Express.fr

L'article finalement le plus intéressant par l'abondance et le caractère apparemment inédit (à défaut d'être véridique, j'avoue que j'ignorais certains détails...) du contenu, est d'ailleurs celui de ce même hebdomadaire, que je reproduis ici.



L'Express
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Vatican-Israël
Le grand pardon

Par Benjamin Barthe, Claire Chartier, publié le 06/05/2009

Après le scandale de l'évêque négationniste Williamson, la visite de Benoît XVI en Terre sainte semblait bien mal partie... Mais les artisans du dialogue judéo-catholique ont fait des miracles. Le Saint-Siège comme l'Etat hébreu tenaient trop à ce voyage.



Ce jour-là, David Rosen, chargé du dialogue interreligieux au grand rabbinat d'Israël, zappe sur la chaîne de télévision internationale France 24. Soudain, son visage se fige: un journaliste annonce que Benoît XVI vient de lever l'excommunication pesant sur quatre évêques intégristes, dont Mgr Williamson, un prélat dont les propos niant la Shoah font depuis deux jours le tour des médias de la planète. Le rabbin décroche aussitôt son téléphone : "Allô, cardinal Kasper ? Vous connaissez la nouvelle ?" L'Eminence en question, à la tête, au Vatican, du Conseil pontifical pour l'unité des chrétiens, tombe des nues. Non, il n'était pas au courant. Lui, l'un des principaux acteurs concernés, informé par un rabbin résidant à des milliers de kilomètres de la place Saint-Pierre ? C'est le monde à l'envers, a dû penser David Rosen.

Voyage en Israël
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Touche finale au tableau, le décret du Vatican tombe le 24 janvier, trois jours avant la Journée de la mémoire de l'Holocauste. Le grand rabbinat d'Israël suspend ses relations avec Rome. Le ministre des Affaires religieuses du pays, Itzhak Cohen, demande la rupture des relations diplomatiques avec le Saint-Siège. La venue de Benoît XVI en Israël s'annonce mal, très mal.

Symbole
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A peine quatre mois plus tard, le pontife allemand est en route vers Jérusalem. Huit jours d'un voyage en Terre sainte qui le mènera de la Jordanie à la Palestine. Huit jours d'un périple compliqué, à la fois pèlerinage spirituel sur les lieux de naissance du christianisme, visite d'Etat et main tendue aux chrétiens, aux juifs et aux musulmans de cette région saignée par les combats et les attentats. Que s'est-il passé ? Un signe du ciel, l'oeuvre de la Providence ? L'explication est plus prosaïque : l'Etat hébreu et plus encore le Vatican tenaient bien trop à ce voyage pour envisager sérieusement de l'annuler.
"L'Etat israélien n'a aucun intérêt à se brouiller avec le Vatican, car le pape est son premier interlocuteur dans le monde chrétien et il ne peut pas s'en priver", explique le journaliste et enseignant Jean-Marie Allafort, fondateur du site Un écho d'Israël. A fortiori lorsque ledit interlocuteur, soucieux du sort des chrétiens vivant dans les territoires occupés, est réputé "diplomatiquement" plus proche des Palestiniens. Après l'opération Plomb durci lancée en décembre et janvier dernier dans la bande de Gaza - et condamnée par plusieurs responsables catholiques - la venue de Benoît XVI tombe donc à point.

Le troisième pape en terre sainte
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Benoît XVI sera le troisième pape à se rendre en Terre sainte, après Paul VI, en 1964, et Jean-Paul II, en 2000. Son voyage, du 8 au 15 mai, ressemble quasi trait pour trait à celui effectué par le pontife polonais : Jordanie, Israël, les territoires palestiniens. À chaque étape, le pape visitera des lieux d'une très forte intensité symbolique, comme l'esplanade des Mosquées, le mur des Lamentations et le musée de Yad Vashem, à Jérusalem, ou la grotte de la Nativité, à Bethléem. Comme Jean-Paul II, il se rendra dans un camp de réfugiés palestiniens. En revanche - geste remarqué en direction des musulmans - Benoît XVI a ajouté à son programme un passage au dôme du Rocher, le plus ancien monument de l'islam, situé à Jérusalem. A la fin de son périple, il aura prononcé 29 discours devant ses hôtes politiques et religieux. Une lourde tâche pour un pape de 82 ans.

Williamson? "Une affaire interne à l'Eglise" pour Israël
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Aussi le nouveau gouvernement israélien, qui compte pourtant nombre d'ultras sionistes en son sein, veille-t-il ostensiblement à ne pas indisposer son futur hôte. Exemple : le 20 avril dernier, lors de la conférence de l'ONU sur le racisme à Genève (Durban II). Alors que plusieurs représentants internationaux quittent la salle, ulcérés par les philippiques prévisibles du président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, contre l'Etat hébreu, l'observateur du Saint-Siège reste dans son fauteuil. On aurait pu s'attendre à une protestation bien sentie d'Avigdor Lieberman, le ministre des Affaires étrangères aux ruades légendaires. Silence total.
Dans un autre élan de bonne volonté - non dénué d'arrière-pensées financières, sans doute - le ministère du Tourisme a mis en place une "route du pèlerinage", afin de permettre aux visiteurs venus acclamer Benoît XVI de suivre les étapes de la prédication de Jésus. Le scandale Williamson ? Il semble déjà loin. Le mea culpa (ndlr: ??? il n'y a eu aucun mea culpa) du pape, condamnant tout révisionnisme, a rassuré la communauté juive. "Ce dossier est une question interne à l'Eglise, déclare le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Ygal Palmor. L'affaire est close."
Bénis soient les artisans du dialogue judéo-catholique! Dès le début de la tempête, ils ont tout fait pour éviter la rupture. Pendant un mois, David Rosen, à la tête du Comité juif international pour les consultations interreligieuses, est resté pendu au téléphone avec son interlocuteur à Rome, le cardinal Walter Kasper.
Le 10 février, Richard Prasquier, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), déjeunait avec le prélat romain en compagnie de Maram Stern, n° 2 du Congrès juif mondial. Dans la même semaine, une cinquantaine de grands rabbins américains étaient reçus par Benoît XVI en audience exceptionnelle. Un mois plus tard, le 12 mars, les grands rabbins d'Israël retrouvaient leurs "homologues"au Vatican, au cours d'une réunion qui avait été repoussée à l'annonce de la levée des excommunications. "Les discussions n'ont jamais cessé", confie David Rosen.
Pour Benoît XVI, le contraire eût été catastrophique. Ce voyage, le pape le souhaitait au point d'en faire l'annonce une année à l'avance aux rabbins américains, puis de l'évoquer à deux autres reprises. Une insistance "peu habituelle", note-t-on à Rome. Neuf ans après le voyage historique de Jean-Paul II en Terre sainte, en 2000, le pontife allemand veut prouver que l'Eglise poursuit le dialogue entamé par le concile Vatican II (1962-1965). Un message devenu plus opportun encore après l'erreur Williamson. D'autant, renchérit le rabbin libéral Alain Michel, que "Benoît XVI donne l'impression en Israël d'être un peu "tiède", plus centré sur l'unité de son Eglise que sur la façon d'approfondir le rapprochement avec le judaïsme".
Il y a des raisons à cela. En libéralisant la messe en latin, en 2008, Benoît XVI a remis au goût du jour la prière du vendredi saint associée à ce rituel d'avant Vatican II, dans laquelle les juifs sont appelés à se convertir. Sous la pression, le pontife a légèrement modifié le texte, mais insuffisamment aux yeux de ses homologues juifs.
Last but not least, la tension autour du "dossier Pie XII" - pape auquel la communauté juive reproche son silence sur la Shoah - est montée d'un cran à l'automne dernier, lorsque Benoît XVI a publiquement souhaité la béatification de son prédécesseur. Le décret requis par la procédure est prêt, le pontife n'a plus qu'à le signer. Mais tout porte à croire qu'il n'en fera rien, conscient de la charge explosive de son paraphe. Quitte à désarçonner un peu plus les observateurs, le Vatican semble même aujourd'hui vouloir collaborer davantage avec les juifs sur le "cas" Pie XII. C'est de Rome qu'est venue l'idée du colloque inédit organisé en mars dernier à Jérusalem entre historiens juifs et catholiques, dans l'enceinte de Yad Vashem, le mémorial de la Shoah. "L'ambiance était bonne", ont raconté les participants à cette grande première. Ce qui, compte tenu du lieu, était loin d'être écrit: le lieu abrite une photo de Pie XII dont la légende, dénonçant l' "absence de directives" du pape durant les massacres nazis, indispose au plus haut point le Vatican.

"Le pape, il faudra qu'il mette la pression sur Israël"
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Au fond - et cette réalité a largement échappé à l'opinion publique européenne, accaparée par l'affaire Williamson - les plus réticents à ce voyage auront été les chrétiens de Terre sainte eux-mêmes. A l'annonce de la visite, "Mgr Fouad Twal, le patriarche latin, a sauté dans le premier avion pour Rome afin d'obtenir des explications du pape", raconte un intime du clergé à Jérusalem.
Difficile, en effet, d'envisager la venue de Benoît XVI, alors que les contentieux qui empoisonnent les relations des communautés chrétiennes avec l'administration israélienne sont loin d'être réglés, telles la taxation du capital foncier des Eglises, ou la liberté de circulation des fidèles, obligés de quémander un permis pour visiter leurs lieux saints depuis l'Intifada.
"Israël se comporte comme le maître de Jérusalem, grince Nizar, un marchand de souvenirs de la vieille ville. Le pape, il faudra qu'il mette la pression sur Israël. Hors de question qu'il se contente de prêcher la paix avec des formules bidon. S'il n'est pas prêt à se remonter les manches, il fera aussi bien de rester à Rome." (ndr: ce Nizar, opportunément convoqué, est-il chrétien? Ou est-ce un musulman? auquel cas son témoignage, sur la visite du pape, aurait une valeur très relative, celle que l'hebdomadaire voudrait lui attribuer, dans un but dont il est responsable, mais qu'il n'est pas difficile de deviner).
Nizar risque d'être déçu, surtout s'il espère du Saint-Père une condamnation de l'occupation israélienne.
"Il n'y a aucune prise de position politique à attendre de Benoît XVI", estime le chercheur Frédéric Encel, auteur d'un Atlas géopolitique d'Israël .
De cette visite, les chrétiens de Palestine -130 000 personnes sur une population totale de 2 millions d'Arabes - retiennent surtout le passage du pape au mémorial de Yad Vashem et sa rencontre avec le président Shimon Peres (ndr: à qui la faute? Et pour quelle raison les journalistes ont-ils fait le voyage?).
Leur crainte? Que l'évêque de Rome, tout à son désir d'apaiser les esprits, n'apparaisse comme l'ami d'Israël. Après l'hécatombe de Gaza, ce serait, pensent-ils, un terrible faux pas.
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Humour... pas seulement

La palme de l'humour, mais aussi du mauvais goût, revient au journal suisse Le Matin, sur le site duquel j'ai fait ces deux captures d'écran



Humour involontaire Le cardinal de Ratisbonne... voilà qui relève de la documentation sérieuse.



Mauvais goût Si on réfléchit à l'image que cela suggère, ça fait froid... dans le dos.



Quand je vous disais qu'il faudrait prendre les informations avec des pincettes...

Je conclus par cette remarque: il paraît qu'il n'y a pas de la part de la presse d'hostilité particulière envers le pape. Enfin, pas plus qu'envers n'importe quel personnage public. Ceux qui pensent cela seraient des paranoïaques en phase terminale...
Il paraît aussi que si on ne parle pas souvent de l'Eglise, c'est uniquement parce que ce n'est pas "porteur" (surtout, n'allez pas chercher de mauvaises pensées!).
Ah bon? En consultant la presse, aujourd'hui (et ce n'est qu'un début) leur mansuétude m'a un peu échappé.
Le reste aussi, d'ailleurs. Je me demande pourquoi 150 journalistes (!! je ne suis pas en mesure de confirmer ce chiffre, vu à différents endroits) sont accrédités pour suivre le pape en avion, sans compter ceux qui sont déjà sur place.
Sont-ce tous des bénévoles? Et que viennent-ils chercher?





Conférence de presse à Jérusalem Les trois scénarios de John Allen